Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/269

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’Angleterre, pourrait, s’il était levé en Chine à la sortie de cette plante, servir à défrayer les dépenses du gouvernement chinois.

Les impôts sur des objets de luxe ont quelque avantage sur ceux qui frappent des objets de nécessité. Ils sont en général payés aux dépens des revenus, et ne diminuent point par conséquent le capital productif du pays. Si le vin renchérissait beaucoup par suite d’un impôt, il est vraisemblable qu’on renoncerait plutôt au plaisir d’en boire, qu’on ne serait disposé à faire une brèche un peu importante à son capital pour avoir le moyen d’acheter du vin. Des impôts de ce genre sont tellement identifiés avec le prix, que le contribuable s’aperçoit à peine qu’il paie un impôt. Mais ils ont aussi leurs inconvénients. D’abord, ils n’atteignent jamais le capital ; et il y a des circonstances extraordinaires où il peut être nécessaire que le capital même contribue aux besoins de l’État ; en second lieu, il n’y a point de certitude quant au produit de ces impôts ; car ils peuvent même ne pas atteindre le revenu. Une personne décidée à économiser, se soustraira à un impôt sur le vin, en renonçant à en boire. Le revenu du pays peut ne pas souffrir de diminution, et cependant l’impôt peut ne pas fournir un seul shilling à l’État.

Tout objet que l’habitude aura rendu une source de jouissances, ne sera abandonné qu’à regret, et l’on continuera à en faire usage, quoiqu’il soit frappé d’un fort impôt ; mais cela a des bornes, et, l’expérience journalière démontre que l’augmentation de la valeur nominale des impôts, en diminue souvent le produit. Tel homme continuerait à boire la même quantité de vin, quoique le prix de chaque bouteille eût monté de trois shillings, qui renoncerait à en boire plutôt que de le payer quatre shillings plus cher. Tel autre consentira à le payer 4 s., qui ne voudra pas en donner 5 s. On peut en dire autant de tout autre impôt sur les objets de luxe. Tel individu pourrait consentir à payer 5 l. pour avoir la jouissance que procure un cheval, qui ne voudrait pas payer 10 l. ou 20 l. pour cela. Ce n’est pas parce qu’on ne peut pas payer davantage qu’on renonce à l’usage du vin et des chevaux, ce n’est que parce qu’on ne le veut pas. Chacun a une certaine mesure d’après laquelle il apprécie la valeur de ses jouissances ; mais cette mesure est aussi variable que l’est le caractère des hommes. Un pays dont les finances sont dans une situation tout artificielle, par le système funeste d’accumuler une grande dette nationale, et, par suite, de se créer des budgets énormes, est plus particulièrement exposé à l’inconvénient inséparable de ce genre d’impôt. Après avoir frappé de contributions tout le cercle de