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Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/335

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blement que la prime n’influe que sur la quantité déjà produite, et qu’elle n’encourage point une nouvelle production. « Dans les années d’abondance, dit-il, la gratification, en occasionnant une exportation extraordinaire, tient nécessairement le prix du blé, dans le marché intérieur, au-dessus du taux auquel il descendrait naturellement…Quoique la gratification soit souvent suspendue pendant les années de cherté, la grande exportation qu’elle occasionne dans les années d’abondance doit avoir souvent pour effet d’empêcher plus ou moins que l’abondance d’une année ne soulage la disette d’une autre. Ainsi, dans les années de cherté, tout aussi bien que dans celles d’abondance, la prime d’exportation tend de même, nécessairement, à faire monter le prix en argent du blé de quelque chose plus haut qu’il n’aurait été sans cela dans le marché intérieur[1]. »

Adam Smith paraît avoir senti parfaitement que la justesse de son raisonnement dépendait uniquement de la question de savoir si « l’augmentation du prix en argent du blé, en rendant sa culture plus profitable au fermier, ne doit pas nécessairement en encourager la production.

  1. Dans un autre endroit il s’exprime de la manière suivante : « Quelque extension que la prime puisse occasionner dans les ventes à l’étranger, dans une année quelconque, cette extension se fait toujours entièrement aux dépens du marché intérieur, attendu que chaque boisseau de blé que la prime fait exporter, serait resté dans le marché intérieur, où il aurait augmenté d’autant la con-sommation et fait baisser le prix de la denrée. Il faut observer que la prime sur le blé, comme toute autre prime pour l’exportation, établit sur la nation deux impôts différents : le premier est l’impôt auquel il faut qu’il contribue pour défrayer la prime, et le second est l’impôt qui résulte du prix renchéri de la denrée dans le marché intérieur ; impôt qui, pour cette espèce particulière de marchandise, se paie par toute la masse du peuple, toute la masse devant nécessairement acheter du blé. Par conséquent, à l’égard de cette marchandise en particulier, le second impôt est de beaucoup le plus lourd des deux… Par conséquent, par chaque 5 schellings pour lesquels le peuple contribue au paie-ment du premier de ces deux impôts, il faut qu’il contribue pour 6 livres sterling et 4 schellings à l’acquittement du second… Par conséquent, l’exportation extraordinaire de blé, occasionnée par la prime, non-seulement resserre chaque année le marché et la consommation intérieure de tout ce dont elle étend le marché et la consommation chez l’étranger, mais encore par les entraves à la population et à l’industrie du pays, sa tendance, en dernier résultat, est de gêner et de comprimer l’extension graduelle du marché intérieur, et par là de diminuer à la longue, bien loin de l’augmenter, la consommation totale et le débit du blé. » (Note de l’Auteur.).