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Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/392

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On pourrait objecter que, quoique l’avantage que tirerait l’État, et par conséquent le public, de ce mode démission de papier-monnaie, soit assez évident, puisqu’on convertirait par là une partie de la dette nationale portant un intérêt payé par le public, en dette sans intérêt ; on pourrait objecter, dis-je, que cependant cela serait nuisible au commerce ; en empêchant les négociants d’emprunter de l’argent, et d’escompter leurs lettres de change ce qui forme, en partie, la manière dont se fait l’émission des billets de banque.

Cela suppose qu’il serait impossible de trouver de l’argent à emprunter si la banque n’en prêtait pas, et que le taux courant de l’intérêt et des profits tient au montant de l’émission de la monnaie et à la voie par laquelle se fait cette émission ; mais comme le pays ne manquerait ni de drap, ni de vin, ni d’aucune autre marchandise, s’il avait les moyens de l’acheter, de même on ne manquerait pas d’y trouver de capitaux à prêter, pourvu que les emprunteurs eussent de bonnes garanties, et fussent disposés à payer le taux courant de l’intérêt pour l’argent prêté.

Dans une autre partie de cet ouvrage, j’ai tâché de faire voir que la valeur réelle d’une chose se règle, non d’après les avantages accidentels dont peuvent jouir quelques-uns de ses producteurs, mais bien d’après la difficulté réelle qu’éprouve le producteur le moins favorisé. Il en est de même par rapport à l’intérêt de l’argent ; il ne se règle pas d’après le taux auquel la banque veut prêter, que ce soit à 5, 4 ou 3 pour cent, mais bien d’après le taux des profits qu’on peut retirer de l’emploi des capitaux, et qui est tout à fait indépendant de la quantité ou de la valeur de l’argent. Qu’une banque prête un, dix ou cent millions, cela n’apportera aucun changement au taux courant de l’intérêt ; la banque ne fera que changer la valeur de la monnaie qu’elle mettra ainsi en circulation. Dans l’un de ces cas, il faudra dix ou vingt fois plus de monnaie pour faire un certain commerce, qu’il n’en faudrait dans l’autre. La demande d’argent à la banque dépend donc du taux des profits qu’on peut retirer de son emploi, comparé avec le taux d’intérêt auquel la banque le prête. Si elle prend moins que le taux courant de l’intérêt, elle peut

    représentation forte et indépendante tient véritablement les cordons de la bourse, et ne l’ouvre que pour payer un petit nombre de fonctionnaires absolument indispensables pour maintenir l’ordre public. Jusque là il ne peut y avoir que des rapines légalisées. — J.-B. Say