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Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 2, 1916.djvu/145

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Puisque Parkman, comme cela semble incontestable, visait à donner de la saveur à son récit en y introduisant un prêtre comme ayant trempé dans ce meurtre, il pouvait le faire, avec moins d’éclat, il est vrai, mais d’une façon plus plausible, en recourant au dernier point de vue que nous venons d’adopter. À pareille méthode, à pareil moyen terme, l’historien américain n’a jamais, ou presque jamais recours. Pour lui, et tous ses écrits le prouvent, l’histoire n’est qu’un jeu de finesse, une course à l’anecdote, et se borne à cueillir des faits au petit bonheur, sans égard à leur provenance et à leur autorité. Il a le don de ne douter de rien. En quelques mots rapides, en quelques phrases admirablement cadencées, il tranche les questions les plus complexes, sans même laisser soupçonner au lecteur les inextricables difficultés qu’elles recèlent. Ah ! c’est que l’analyse consciencieuse des problèmes entraverait sa marche, alourdirait son style. Au reste, ce procédé ne convient qu’à l’écrivain sincère, à celui qui, ne voyant dans l’histoire que la recherche sérieuse de la vérité, ne craint pas de mettre le public en état de juger par lui-même et des faits qu’il discute et de la valeur de ses assertions. Parkman, fût-il doué de la péné-

    eût, d’autre part, déchaîné leur instincts barbares pour leur laisser commettre lâchement un meurtre infâme ! Cela implique une intolérable contra diction. Missionnaire de l’Évangile, Le Loutre, si loin qu’il ait été dans son patriotisme, s’est toujours efforcé de refréner la cruauté naturelle à ces peuples. Qu’ils aient, eu cette circonstance, et pour des raisons d’animosité personnelle contre Howe, oublié ses enseignements, et échappé à son action, il faut le déplorer sans doute, mais cela est beaucoup plus humainement explicable, et conforme à la psychologie de ces êtres primitifs ou dégénérés, que la conclusion à laquelle Richard déclare s’en tenir, et qui noircit finalement une mémoire qu’il s’est longuement efforcé de réhabiliter. Cette concession aux ennemis du nom français et catholique est absolument malheureuse.