Aller au contenu

Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 2, 1916.djvu/306

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Québec, il s’embarqua pour la France dans le mois d’août suivant ; mais un autre malheur l’attendait en chemin : le vaisseau sur lequel il se trouvait fut capturé en mer par les Anglais, et lui-même enfermé au château Elizabeth, dans l’île de Jersey, d’où il ne recouvra sa liberté que huit ans après, à la conclusion de la paix.

Cet exploit — la prise de Beauséjour — était au fond l’œuvre de Pichon. C’était la lettre, authentique ou non, de Duquesne qui avait donné lieu à cette expédition. Suivant ce qui avait été convenu entre lui et le capitaine Scott, au lieu de suivre la garnison française à Louisbourg, Pichon fut gardé quelque temps prisonnier à Beauséjour, puis dirigé au Fort Édward à Pigiquit, et finalement à Halifax, où il était apparemment captif, mais où sa vraie mission était de se mêler aux officiers qui y étaient détenus ou qui y seraient amenés, et de tâcher de surprendre ainsi les projets des Français.

Or, le temps était venu pour ce traître de réclamer plus amplement le prix de ses services. Le mémoire qu’il adressa à cet effet au secrétaire du gouverneur[1] porte, comme bien

    tions eussent enfin sombré ! C’est ainsi que les historiens protestants, un Mur(loch, un Parkman, apprécient la carrière de ce missionnaire ; leur jugement n’a pas de quoi nous étonner. Comment pouvaient-ils comprendre la sublimité du sacerdoce catholique ? Mais Richard pensait autrement, et il nous semble que la phrase en question a dû lui échapper, car elle est peu digne de lui. Si la perte de Beauséjour a profondément affligé l’âme de Le Loutre, ce n’est certes pas pour des raisons personnelles ni intéressées ; ce n’est même pas parce que la France, qu’il aimait de tout son cœur, allait voir diminuer d’autant son prestige ; c’est qu’il voyait dans ce fait le prologue immédiat du sombre drame au cours duquel la petite nation acadienne serait étouffée.

  1. Doc. inéd. sur l’Acadie, Can. Fran. II, pièce 88, page 127 et seq. — Correspondence between Pychon (or Tyrel) with the British officers. — Pychon or Tyrel either to Bulkeley or Henshelwood. Du British Museum. Brown MSS. Add. 19073, f. 21, no 24, 1753-17.55, Mr. A. B. Grosart fait précéder ce document des