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Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 2, 1916.djvu/486

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nous allions les accueillir et avoir foi en eux comme sujets dans de telles circonstances, cela équivaudra à la perte des avantages acquis par cette victoire.

Si tel est leur attitude au moment où nous avons les troupes et la flotte avec nous, que n’oseront-ils pas et jusqu’où iront leur insolence et leurs agressions quand cette protection nous manquera !

4. — Cela entraverait le progrès de la colonisation, et l’arrêterait peut-être entièrement.

On compute comme suit la proportion des habitants français aux habitants anglais :


À Annapolis, 200 familles composées de 5 membres chacune 1000
Aux Mines, 300 famille"composées de"membres" 1500
À Piziquid, 300 famille"composées de"membres" 1500
À Chibouctou, 800 famille"composées de"membres" 4000

8000
600 familles anglaises composées de 5 membres chacune 3000
Surplus d’habitants français 5000


Sans compter les Français résidant à Lunenburg et les habitants de Lunenburg eux-mêmes qui sont plus sympathiques aux Français qu’aux Anglais.

Une telle supériorité du côté de ceux qui ont juré de ne pas devenir sujets du roi est propre à inquiéter les colons actuels et à décourager ceux qui auraient l’intention de venir s’établir dans cette province, car il est bien connu que s’ils prêtent le serment, ils ne se croiront pas engagés après en avoir obtenu la dispense.

5. — D’autre part, considérant qu’il ne sera plus possible de les déporter de cette province après le départ de l’armement dont nous disposons présentement ; et que leur déportation deviendra inévitablement nécessaire, car il est incontestable qu’ils se livreront de nouveau avec plus d’artifice et de rancune qu’auparavant, à la perfidie et à la trahison ;

Considérant aussi que la présence dans cette province, de ces habitants français attachés à la France, est de nature à favoriser tous les projets du roi de France et les tentatives de celui-ci pour s’emparer de la dite province : —

À ces causes je crois que ces raisons et la nécessité impérieuse — qui est la loi du moment — de protéger les intérêts de Sa Majesté dans la province, m’obligent de conseiller humblement la déportation de tous les habitants français.

(Signé)     JONATHAN BELCHER.[1]

Halifax, 28 juillet 1755.

  1. Le document ci-dessus fut lu devant le gouverneur en son Conseil, à Halifax, le 28 juillet 1755, jour où fut prise par le Conseil, la décision finale d’expulser et de déporter les Acadiens. Jonathan Belcher était alors juge en chef de la Nouvelle-Écosse.