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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/391

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du Chev. Grandisson.

quoiqu’à juger par le fond d’un caractere si noble & si bienfaisant, elle le croie capable des passions les plus tendres, elle attribue son indifférence apparente à la multitude de ses affaires, autant qu’à la difficulté de trouver une femme dont les perfections répondent à celles de ses idées. On est retombé de-là sur son éloge. Je ne conçois pas, ma chere, dans quelle vue chacun prend plaisir à louer devant moi Sir Charles Grandisson. Sortirai-je de Londres pour éviter d’entendre ses louanges ? Oui, me direz-vous. Mais où dois-je aller ? Ce n’est pas au Château de Selby. Autant vaut donc que j’aille à Colnebroke ; j’y apprendrai peut-être les raisons d’un applaudissement si général, car jusqu’à présent je ne sais rien de son Histoire, en comparaison des détails qu’on me promet.

Cependant j’espere qu’on ne me blâmera point d’avoir consenti si facilement au voyage de Colnebroke. C’est, à la vérité, mon inclination qui m’a rendue si complaisante, & je commence à me défier de moi-même lorsqu’elle a la force de m’entraîner : mais pourquoi donner une si mauvaise idée de moi ? Je me connois le cœur bon, & sur ce point je ne me crois inférieure à personne. Il me semble que je n’ai rien de bas dans l’ame ; non, je ne me sens naturellement aucune bassesse. Puisse le Ciel me préserver de tout défaut qui n’est pas naturel à mon cœur, & qui m’avilissant aux yeux