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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/128

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Histoire

Au fond, Chevalier, ma Sœur est une Fille fort noble. On est trop porté peut-être à se gouverner par les événemens, sans approfondir les causes. Mais vous avoir laissé un accès si libre auprès d’elle ! avec toutes les qualités qu’on vous connoissoit ! & que les circonstances, j’en conviens, n’ont servi qu’à faire éclater à votre avantage…

Ah, Monsieur, interrompis-je, c’est juger encore par les événemens. Mais vous avez la Lettre de Madame Bemont. Quel plus noble témoignage de magnanimité dans une Femme ! Je ne vous apporterai point d’autre preuve en faveur de ma conduite.

J’ai cette Lettre. Jeronimo me l’a donnée à mon départ, & je me souviens qu’il m’a dit, en me la remettant : le Chevalier Grandisson ne manquera point de vous aller voir à Naples. Votre vivacité m’épouvante. On connoît sa fermeté. Toute mon espérance est dans ses principes. Traitez-le avec noblesse. Je compte sur la générosité de votre cœur, mais relisez cette Lettre avant que de le voir. Je vous avoue, continua le Général, que je n’ai point encore eu de penchant à la lire ; mais je la lirai, & je vais le faire à ce moment, si vous me le permettez.

Il la tira de sa poche, & s’éloignant de quelques pas, il la lut d’un bout à l’autre. Ensuite, revenant à moi, il me prit affectueusement la main : j’ai honte de moi-même, mon cher Grandisson. J’ai manqué de grandeur d’ame, je l’avoue. Tous les