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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/287

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du Chev. Grandisson.

m’a-t-il dit. Cependant votre sensibilité me charme. Elle vient ! elle marche vers nous !

Elle s’est approchée, les yeux à demi fermés, & toujours baissés vers la terre. Sur un mouvement qu’elle a fait, pour tourner vers la fenêtre, Camille lui a dit, ici, ici, Mademoiselle ; & l’a menée vers un fauteuil, qu’on avoit placé pour elle, entre les deux Marquises. Elle a suivi sans résistance. Elle s’est assise. Sa Mere a pleuré. La jeune Marquise a pleuré aussi. Son Pere soupiroit, & détournoit ses yeux d’elle. Sa Mere lui a pris la main, en lui disant : mon amour, regardez autour de vous. Je vous prie, Madame, a dit le vieux Comte, laissez-lui faire ses propres observations. Elle a paru sourde à ce que disoient sa Mere & son Oncle. Elle n’a pas même levé les yeux. Camille étoit debout, derriere son fauteuil.

Le Général s’est levé, avec un mélange de douleur & d’impatience, & s’est approché d’elle. Chere Sœur, lui a-t-il dit, en penchant la tête sur son épaule, regardez-nous donc. Ne nous traitez pas avec cette apparence de mépris. Voyez votre Pere, votre Mere, votre Sœur, & tout le monde en pleurs autour de vous. Si vous nous aimez, accordez-nous un sourire. Il a pris sa main, que sa Mere avoit quittée pour s’abandonner à ses propres émotions.

Elle a levé enfin la vue sur lui ; & faisant comme un effort de complaisance, elle a tâché de sourire : mais l’air sombre avoit