Aller au contenu

Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/348

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
138
Histoire

lui, s’est hâté de lui venir rendre ses respects. Elle m’a remis les Lettres ; & je les ai glissées dans les mains du Docteur, sans que Miss Byron s’en soit apperçue. On m’a dit, a repris cette chere Fille, que mon Émilie s’est trouvée mal. Je sors un instant pour le savoir d’elle-même. Non, mon Amour, lui a dit sa Tante, en la retenant par la main : Émilie sera tout à l’heure ici.

Cet empressement, pour l’arrêter, lui a fait naître de nouveaux soupçons. Elle nous a regardés successivement. Je vois, nous a-t-elle dit, dans les yeux de tout le monde, un air de compassion, qui doit signifier quelque chose. Si c’est sur moi qu’elle tombe, je demande en grace, que par une tendresse mal entendue, je ne sois pas la derniere qu’on ait la bonté d’en informer. Mais je devine… avec un sourire forcé.

Que devine mon Henriette ? a dit sa Tante.

Le Docteur, a-t-elle répondu, m’a fait assurer que Sir Charles se porte bien, & que ses Amis commencent heureusement à se rétablir : il ne m’est donc pas difficile de deviner, par le silence qu’on garde sur le fond des Lettres, que Sir Charles est, ou marié, ou fort proche de l’être. Que dites-vous, cher Docteur ?

Il n’a fait aucune réponse, mais ses yeux étoient mouillés. Miss Byron s’est tournée vers nous, & nous a tous vus avec notre mouchoir aux nôtres. Son Oncle, quittant sa chaise, est demeuré debout près d’une fenêtre, le dos tourné vers nous.