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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/398

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Histoire

générosité, si je pouvois juger des combats qui se passoient dans son cœur. Je n’ai rien épargné pour rendre le calme à son esprit. Je l’ai assurée que je me conduirois par ses volontés ; que son Écrit seroit mon étude constante, & sa conscience la regle de mes desirs. Mais dans les agitations dont j’appercevois une partie, malgré l’effort qu’elle faisoit pour se vaincre, elle m’a demandé enfin la liberté de demeurer seule, après m’avoir fait promettre de la revoir le jour suivant. Ses yeux, qui commençoient à s’égarer, m’ont fait sortir aussi-tôt pour cacher ma propre émotion. Mais, en me retirant avec cette promptitude, j’ai surpris le Pere Marescotti qui étoit venu prêter l’oreille, comme je l’ai reconnu à sa confusion & même à quelques excuses qu’il m’a faites en hésitant, aux discours que j’avois tenus à sa Fille spirituelle. Quelle pitié, qu’un zele mal entendu puisse rendre un honnête homme capable d’une bassesse !

Point d’apologies, mon cher Pere, lui ai-je dit de l’air le plus doux & le plus civil. Si vous doutez de mon honneur, je crois vous avoir obligation de la méthode que vous prenez pour m’éprouver. Il m’a demandé mille fois pardon, en me confessant qu’il avoit regardé comme impossible qu’un jeune homme, dont on ne pouvoit mettre l’amour en doute pour une des plus aimables Filles du monde, se renfermât dans les bornes qu’on lui avoit prescrites, & ne fît pas