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Page:Richomme - Contes chinois, précédés d'une Esquisse pittoresque de la Chine, 1844.pdf/175

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bois et de terre. Le silence le plus profond régnait au milieu de la foule, lorsque le grand-juge dit d’une voix haute, mais tremblante :

« L’Empereur doit condamner Koueï au supplice de la cangue, à la confiscation et à l’exil : Koueï a proféré des paroles maudites contre le divin Chun. Qu’il soit puni, car il est coupable. »

La foule s’agita en murmurant ; on entendit deux cris terribles :

la femme de Koueï et sa fille tombaient évanouies. Le mandarin pâlit et versa quelques larmes, puis, honteux de sa faiblesse, il releva la tête et regarda l’Empereur d’un air calme.

Chun, appuyé sur son premier ministre, était debout, les yeux étincelants, le visage coloré ; et, agitant la main droite avec colère :

— Non ! s’écria-t-il d’une voix éclatante, non, il ne sera point puni, car il n’est point coupable. Ah ! misérables conseillers qui punissez l’innocent sur la parole du maître, sans preuves, sans conscience, pour satisfaire votre haine et votre ambition ! Allez, disparaissez à jamais de ma présence. L’Empereur, dans sa clémence, ne vous imposera point d’autre châtiment.

Et se tournant vers les mandarins assemblés autour de lui :

— Le maître peut se tromper ; c’est aux bons serviteurs à lui faire connaître son erreur, même en bravant sa colère. Car s’il commet des injustices, à qui les peuples auront-ils recours ? Quant à vous, Koueï, si je vous ai choisi pour une pareille épreuve, c’est que j’étais certain de votre innocence ; mais une réparation vous est due. Voici ce qu’ordonne l’Empereur : Houan-teou, votre frère, et vos plus proches parents rempliront les fonctions des mandarins Loung et Kao-yao et des autres perfides conseillers que je viens de chasser. Votre fille épousera le jeune Ki, le fils de mon bien-aimé Yu, et, vous-même, je veux que vous soyez le premier ministre de l’Empire.

La multitude se prosterna et fit retentir les airs de ses cris de