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Page:Richomme - Contes chinois, précédés d'une Esquisse pittoresque de la Chine, 1844.pdf/218

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d’ailleurs par le poids de ses remords, se jeta à ses genoux, avouant sa lâcheté et demandant pardon. Kia-tan était en délire, il n’entendait rien. Déjà il levait la main pour infliger à Wang-po une correction bien méritée, lorsque voyant la pâle et douce figure de l’enfant inondée de larmes, il baissa la tête et se prit à pleurer. Wang-po se releva, et, lui sautant au cou, il l’embrassa avec effusion, implorant de sa générosité qu’il voulût bien oublier sa méchante action. L’arbre mourut, et les parents reprochèrent avec amertume à Kia-tan sa négligence et sa paresse ; lui, était heureux. Son beau quey-wha n’existait plus ; mais son frère l’avait embrassé !

Soit par suite du remords que lui causait sa lâcheté, soit par crainte de la colère de son frère dont il avait appris à connaître pour la première fois la force redoutable, Wang-po vécut pendant quelque temps avec lui en bonne intelligence ; il lui proposa même un matin de venir dans un étang du palais pêcher aux oiseaux. C’est une pêche originale, assez usitée en Chine. On dresse une espèce d’oiseaux, semblables au cormoran, à prendre du poisson. À un signal donné, qui consiste à frapper l’eau avec les rames, ces oiseaux s’élancent, dans la rivière, saisissent le poisson et le rapportent, dans le bateau ; ils ont le cou serré par un anneau, qui les empêche d’avaler leur proie. Lorsqu’ils trouvent un gros poisson trop difficile à saisir, ils se mettent plusieurs ensemble, et finissent par s’en emparer.

Kia-tan accepta avec joie l’offre de son frère, et tous les deux se placèrent séparément dans une barque avec plusieurs de ces oiseaux de proie. Ils pêchèrent ainsi une bonne partie de la matinée ; mais Wang-po avait mal choisi son endroit, ou bien ses oiseaux étaient mal exercés, car il prit à peine cinq à six petits poissons, tandis que son frère rapportait à la maison un grand panier plein du produit de sa pêche. Les mauvais instincts de Wang-po se ré-