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Page:Robert - Les Mendiants de la mort, 1872.djvu/57

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les mendiants de la mort

ces plus ou moins favorables m’entraînaient ailleurs… Un loyer de cinquante francs par an, cela ne me ruinait pas.

Pasqual avait eu, en parlant de son ancienne demeure, une émotion profonde qui s’était communiquée à Herman.

— Mon pauvre ami, dit ce dernier, je veux voir cette misérable demeure que vous avez habitée. Cela me fera mieux sentir encore le mérite de celui qui, étant sorti de si bas, a eu tant d’intelligence et de facultés diverses à me dévouer.

Puis, sans attendre l’assentiment de Pasqual, il sauta à bas de la voiture, et entra dans la maison avec lui.

Ils passèrent devant les deux étages, et, arrivés au troisième, dans un étroit corridor construit en planches, dans lequel donnaient les portes numérotées des mansardes. Pasqual ouvrit la chambre du fond, qui était la sienne.

Cette petite pièce était soigneusement arrangée, sauf la poussière qui s’y incrustait depuis longtemps. Il y avait un lit d’indienne, une table, quelques chaises ; des vêtements de paysan étaient encore suspendus à un clou de la muraille. Dans son aspect si peu remarquable, cet intérieur portait une empreinte de tristesse réelle ou imaginaire.

La présence du maître, tel qu’on le voyait maintenant, contrastait beaucoup avec son ancienne demeure. Pasqual, avec un habit noir bien fait, avait tous les accessoires d’une mise soignée, et sa figure régulière paraissait dans tout son avantage ; cependant il y avait encore dans ses longs cheveux blonds, dans la lueur limpide et errante de ses yeux bleus, quelque chose d’agreste et d’étranger à nos villes, qui rappelait son origine.

Herman, dans son affection enracinée et presque extraordinaire pour son intendant, regardait avec intérêt le lieu où celui-ci avait vécu malheureux. Sans connaître précisément les angoisses que le fils de la campagne avait pu subir, si ce n’était celles de la misère, il éprouvait presque en cet endroit, comme Pasqual lui-même, l’impression des douloureux souvenirs.

Comme le maître de la mansarde avait en entrant ouvert le volet de bois plein qui garnissait la fenêtre, le vitrage était resté mal joint ; et tandis que Pasqual cherchait dans une armoire les objets qu’il était venu prendre, Herman s’approcha machinalement de la croisée.

Elle donnait en face du jardin et de la seconde façade de l’ancien hôtel Rocheboise.