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Page:Rodenbach - Le Foyer et les Champs, 1877.djvu/27

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La voyaient travailler à son troisième étage,
Rieuse et belle avec son modeste corsage.
Un lit, puis une table et deux chaises de bois
Formaient l’ameublement de ce nid sous les toits.
Quelques lys rayonnaient au bord de la fenêtre
Où l’aurore en riant et pleurant venait naître,
Et la vierge et les fleurs confondaient leurs parfums.
Dans un coin, — souvenir de ses parents défunts, —
La chaste enfant gardait sur une vieille armoire,
Tout jauni par les pleurs, un crucifix d’ivoire,
Pauvre et nu qui veillait sur sa virginité.
Étant honnête et simple elle avait la gaîté.
Et tandis que ses doigts jouaient avec l’aiguille
Sa chanson s’envolait aux oiseaux, sa famille,
Les invitant par grâce à venir l’égayer,
Ou partager sa chambre et son pain sans payer.
Là, Goëthe eût vraiment cru retrouver Marguerite,
Son rouet et ses fleurs et sa branche bénite.
Elle offrait au bon Dieu son cœur et son travail
Lorsque la lune ouvrait au ciel son éventail
Que les nuages blancs entouraient de leur frange ;
Puis s’endormait heureuse, et, dans la nuit étrange,
Les rêves voltigeant aux plis de ses rideaux
Égayaient son sommeil comme un essaim d’oiseaux.
Oh ! que vous êtes bien là haut dans la mansarde,
Plus près du ciel d’azur et de Dieu qui nous garde !…

II.

Mais hélas peu de temps elle eût ce logis-là ;
Au retour de l’hiver vite elle s’en alla :