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BEETHOVEN

allemands, il rendait hommage aux Français et rappelait que d’eux lui venait son Fidelio[1].


Ce qui lui venait d’eux, dans Leonore, ce n’éiait pas seulement une anecdote, plus ou moins habilement contée, c’était une atmosphère de réalité tragique, — c’était la Révolution.

Mais eux-mêmes, comme il arrive à ceux qui, enfoncés dans l’événement, le nez collé au détail quotidien, n’en peuvent dégager les grandes lignes éternelles, — eux-mêmes n’avaient point perçu le souffle eschyléen, que transmettait leur récit[2]. Comme il avait été, dans l’Héroïque, l’Homère de l’Empire, Beethoven fut, dans Leonore, l’Eschyle de la Révolution.

Chacun sait que le sujet de Leonore est emprunté à Bouillv, qui ne l’avait pas inventé : car il en avait connu l’héroïne, qui était une Tourangelle. Il l’a depuis, raconté dans ses

1. Il donne le premier rang aux librstli de Fidelio, de la Vestale et du Porteur d’eau. Sur les trois, deux sujets inspirés directement des événements de la Révolution française.

2. Beethoven n’en prit conscience lui-même qu’au milieu du premier acte. Quand il commença l’œuvre, il ne voyait encore que le beau fait-divers. Et le moins saisissant n’est pas la découverte qu’il fit soudain de la grandeur épique du sujet, lorsqu’après avoir dessiné le caractère de Bizarre, il s’identifia avec 1 angoisse et l’héroïsme de Leonore.

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