Page:Rolland - Beethoven, 1.djvu/279

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
244
BEETHOVEN

nique de Leonore a pris tout l’essentiel à celle de Méhul et de Cherubini. Là encore, elle a su mûrir le fruit un peu vert, un peu sec, et en exprimer tout le jus, quand ils s’étaient contentés de quelques gouttes.

Il faut se rappeler que Beethoven, à l’époque de Leonore, se délectait, au théâtre (car il pouvait encore entendre), des opéras français, qui faisaient les délices de Vienne 1 ; et aucun maître vivant n’égala, dans son estime, Cherubini. Au milieu des esquisses de Fidelio, on trouve, notées par lui, des scènes du Porteur d’Eau. Seyfried et Sehindlcr attestent son admiration persistante, pour le maître de Médée ; et l’on sait que Beethoven lui-même, au faite de son génie, en écrivit humblement l’hommage à Cherubini (1823).

Il n’est donc pas surprenant qu’on en retrouve des traces dans son œuvre. Dès son vivant. Hoffmann, qui voyait toujours plus à fond que les autres, avait été frappé du lignage commun aux ouvertures de Cherubini et à Y Ouverture de Coriolan. Depuis, Wagner et la critique aile-Beethoven connaissait. Hermann Abert a noté quelques réminiscences, mais à fleur de peau, notamment dans le quartett vocal en canon. Pour Berlioz, l’air de Rocco sur l’or était le seul de Gaveaux qui put soutenir la comparaison.

1. Thayer (T. II. Appendice I) donne une liste des opéras de Cherubini que Beethoven put entendre à Vienne : 1802, Les Deux Journées ou le Porteur d’eau ; Médée ; Lodoïska ; Der Bernardsbcrg ; 1803 : L’Hôtellerie portugaise ; La Prisonnière ; — 1806, Faniska. (Cf. R. Hohenemser : L. Cherubini, 1913 ; — Kretzschmar : Ueber die Bedeuiung von Cherubinis Ouvcrtüren und Hauptopern fiir die Gegenwart ; —- et surtout Arnold Schmitz : Cherubinis Kinfluss auf Bceihovens Ouverlüren (Ncues Beethoven-Jahrhuch, 1923).