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BEETHOVEN

en ioutes les modulations... » Celte poursuite passionnée, cette multiplication de l’idée saisie, ployée, domptée, qu imposent à Vauditeur le martèlement du rythme, les répétitions hallucinées, la brûlure sensuelle des colorations d’orchestre et des modulations, produisent sur l’esprit et les sens naïfs, sincères, qui se livrent, un effet d’hypnose, un Yoga. Comme le Yoga de VInde, une fois qu’on l’a atteint, on l’emporte avec soi, en marchant, en parlant, en travaillant, dans tous les actes de la vie quotidienne. Il est sous-jacent. Comme une huile aromatique, infectée sous la peau... »

Ce n’était point au hasard que j’employais, par trois, quatre, et cinq fois, dans mon Étude, ce mot de « Yoga ». Mes travaux m’avaient mis, au cours de la même année, en contact avec certains des plus grands esprits de l’Inde contemporaine, qui ont pratiqué le Yoga, — notamment avec l’extraordinaire Ramakrishna, ce maître incomparable de la contemplation religieuse, et avec son puissant disciple, Vivekananda h J’avais lu, décrit, chez eux, avec une étrange précision, tous les degrés de cette concentration yogiste, avec les effets physiologiques et moraux de ce qu’ils appellent la montée, dans les canaux du corps, du Kundalini Sakti (de l’essence de la force). Mais ils en connaissaient les dangers, pour y avoir, comme Ramakrishna, par miracle, échappé ; et ils en prémunissaient leurs disciples. Ils leur interdisaient de s’y livrer, au hasard, et sans une intérieure nécessité : ils savaient bien que ces exercices de concentration passionnée, sans mesure, me* î Je prépare un ouvrage sur ces deux personnalités.