Page:Rolland - Pierre et Luce.djvu/173

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Ils savaient que rien de tout cela ne serait, — Pierre, par pressentiment de pessimisme natif, — Luce, par clairvoyance d’affection qui savait l’impossibilité pratique du mariage… C’est pourquoi ils se hâtaient de le goûter, en rêve. Et chacun cachait à l’autre sa certitude que ce ne serait qu’un rêve. Chacun croyait en avoir le secret, et veillait, attendri, sur l’illusion de l’autre.

Quand ils avaient épuisé les délices douloureuses de l’avenir impossible, ils étaient pris d’une fatigue, comme d’avoir vécu. Alors, ils se reposaient, assis sous la tonnelle aux lianes desséchées, dont le soleil fondait la sève gelée ; et, la tête de Pierre sur l’épaule de Luce, ils écoutaient en rêvant le bourdonnement de la terre. Sous les nuages qui passaient le jeune soleil de