Page:Rolland - Pierre et Luce.djvu/26

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pouvait pas dire ! Car le premier mot de toutes était : « Mais si je n’y crois pas ! » — Un blasphème déjà. — Non, il ne pouvait parler. Ils l’eussent regardé, avec une stupeur effrayée, indignée, avec peine, avec honte. Et comme il était à cet âge plastique, où l’âme, d’écorce trop tendre, se ride aux moindres souffles qui viennent du dehors et, sous leurs doigts furtifs, se modèle en frémissant, il se sentait d’avance, lui-même, triste et honteux. Ah ! comme ils croyaient tous ! (Mais est-ce qu’ils croyaient, tous ?) Comment faisaient-ils donc ? — On n’osait le demander. À ne pas croire, seul, au milieu de tous qui croient, on est comme quelqu’un à qui manque un organe, peut-être superflu, mais que tous les autres ont ; et rougissant, on cache aux yeux sa nudité.