Page:Rolland Handel.djvu/44

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Ses critiques et ses conseils pour le style du chant, pour le jeu des acteurs, ne furent pas moins efficaces. Il avait le sens du théâtre. Il voulait la vie sur la scène, l’action ; il attachait une importance considérable à la pantomime, « qui est une musique muette[1] ». Il faisait campagne contre le jeu impassible ou inintelligent des chanteurs et des choristes allemands ; et il voulait que le compositeur pensât toujours, en écrivant, au jeu des acteurs. « La connaissance des jeux de physionomie des acteurs sur la scène, dit-il, peut souvent être une source de bonnes inventions musicales[2]. » — C’était là le langage d’un vrai homme de théâtre[3]. Au reste, Mattheson était trop musicien pour asservir la musique à la parole. Il cherchait à les unir, en sauvegardant leur indépendance à toutes deux, mais en donnant le pas à l’âme sur le corps, à la mélo-

  1. Vollkommener Kapellmeister, 1739. — Il consacre, dans cet ouvrage, une étude très importante à ce qu’il nomme l’Hypokritik (Pantomime).
  2. Ibid.
  3. En théorie, sinon en pratique : car ses opéras sont médiocres. D’ailleurs il se dégoûta vite du théâtre. Des scrupules religieux lui vinrent. Il voulut d’abord épurer l’opéra, faire du théâtre quelque chose de sérieux et de sacré ( « ernsthaftes und heiliges » ), qui agit sur les masses, d’une façon instructive et moralisatrice. (Musikalischer Patriot, 1728.) Puis il s’aperçut que sa conception d’un opéra moral et édifiant n’avait aucune chance de se réaliser. Alors, il s’en désintéressa, et se réjouit même, en 1750, de la ruine définitive de l’Opéra de Hambourg.