Page:Rolland Handel.djvu/97

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Keiser, Telemann, Mattheson écrivaient à Hambourg des Passions qui faisaient grand bruit[1], sur un texte fameux du sénateur Brockes. À leur exemple, peut-être pour se mesurer avec ces hommes qui tous trois avaient été ses rivaux ou ses amis[2], Hændel reprit le même texte, et écrivit, lui aussi, en 1716, une Passion nach Brockes.

Cette œuvre puissante et disparate, où le mauvais goût et le sublime se coudoient, où la préciosité et l’emphase se mêlent à l'art le plus

  1. Keiser, le premier, en 1712 : Der für die Sünden der Welt gemarterte und sterbende Jesus…, etc. (Jésus martyrisé et mourant pour les péchés du monde). — Puis, Telemann, en 1716, quelques mois avant l’arrivée de Hændel. Et peu après, Mattheson. — La Passion de Hændel fut exécutée pour la première fois, à Hambourg, pendant le carême 1717, lorsque Hændel était déjà revenu en Angleterre. Les quatre Passions de Keiser, Telemann, Mattheson et Hændel furent données en 1719 au Dom de Hambourg, Mattheson étant cantor.
  2. Hændel et Mattheson échangèrent alors quelques lettres. Mattheson venait d’engager une polémique musicale avec l’organiste et théoricien Buttstedt ; il éprouvait le besoin de s’appuyer sur les autorités de la musique allemande. Il leur adressa un questionnaire pour une enquête (sur les modes grecs, sur la solmisation, etc.). Hændel, pressé de questions, répondit, tardivement, en 1719 ; il donnait raison à Mattheson, moderniste déclaré, contre les partisans des modes anciens. Mattheson lui demandait aussi des détails sur sa vie, afin de les faire figurer dans un Dictionnaire biographique, qu’il projetait, Hændel se récusa, faute du recueillement nécessaire ; il promit seulement, d’une façon vague, de « repasser plus tard les Époques principales qu'il avait eues dans le cours de sa Profession ». — Mais Mattheson ne parvint jamais à en rien tirer de plus.