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Page:Ronsard - Œuvres complètes, Garnier, 1923, tome 2.djvu/170

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II. LIVRE DES AMOURS

un grand Heros, nommé Dioclée, avoient au printemps ordonné à l’entour de son tombeau des couronnes et des fleurs aux jeunes enfans qui se baiseroient le mieux. LXXIIII

Cesse tes pleurs, mon livre : il n’est pas ordonné Du destin, que moy vif tu sois riche de gloire : Avant que l’homme passe outre la rive noire, L’honneur de son travail ne luy est point donné. Quelqu’un apres mille ans de mes vers estonné Viendra dedans mon Loir, comme en Permesse, boire : Et voyant mon pays, à peine pourra croire Que d’un si petit champ Ronsard se vante né. Pren mon livre, pren cœur : la vertu precieuse » De l’homme, quand il vit, est tousjours odieuse : » Mais apres le trespas chacun le pense un Dieu. » La rancœur nuit tousjours à ceux qui sont en vie : » Sur les vertus d’un mort elle n’a plus de heu, » Et la postérité rend l’honneur sans envie. BELLEAU

Cesse tes pleurs, mon livre.) Icy l’Autheur parle à son livre, lequel se plaignoit qu’on ne faisoit conte de luy. Il l’admonneste d’avoir patience, et luy dit qu’il ne sera parfaitement honoré qu’apres sa mort. Apres mille ans.) Il luy dit, que ceux qui naistront apres luy, esmerveillez de ses doctes labeurs, iront avecques grande solennité voir le lieu de sa naissance. Et voyant le Vendomois si petit, à grand’ peine pourront ils croire, qu’un si grand Poète en soit sorty : et voudront boire de la riviere du Loir, comme de l’eau de Permesse, pour estre faits Poètes comme nostre Autheur. Cecy est pris d’Ovide s'