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Page:Ronsard - Œuvres complètes, Garnier, 1923, tome 2.djvu/183

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Il me fault trouver autres plaintes.
Mes veritables passions
Ne se peuvent servir de feintes.
Le meilleur remede en cecy,
C’est mon torment et mon soucy,
Ma mort, et ma vie.
Au pris de moy les amoureux
Voyant les beaux yeux de leur dame,
Cheveux et bouche, sont heureux
De bruler d’une vive flame.
En bien servant ils ont espoir :
Je suis sans espoir de revoir
Ma mort, et ma vie.
Ils aiment un sujet qui vit :
La beauté vive les vient prendre,
L’œil qui voit, la bouche qui dit :
Et moy je n’aime qu’une cendre.
Le froid silence du tombeau
Enferme mon bien, et mon beau,
Ma mort, et ma vie.
Ils ont le toucher et l’ouyr,
Avant-courriers de la victoire :
Et je ne puis jamais jouyr
Sinon d’une triste memoire,
D’un souvenir, et d’un regret,
Qui tousjours lamenter me fait.
Ma mort, et ma vie.
L’homme peult gaigner par effort
Mainte bataille, et mainte ville :
Mais de pouvoir vaincre la Mort
C’est une chose difficile.
Le ciel qui n’a point de pitié,