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Page:Rouquette - La Thébaïde en Amérique, 1852.djvu/75

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« d’inquiétude, et ne dites point : que mangerons-nous, que boirons-nous, ou de quoi nous habillerons-nous, comme font les Païens qui recherchent toutes ces choses ; car votre Père sait que vous en avez besoin. Cherchez premièrement le royaume de Dieu, et toutes ces choses vous seront données par surcroît. » (St-Mathieu, ch. 5.)

« Vendez tout ce que vous avez, et donnez-le aux pauvres ; et vous aurez un trésor dans le ciel : puis venez et me suivez. » (St-Luc, 18, 22.)

Voilà l’origine et le fondement de la vie ascétique et solitaire, de la vie érémitique.

« Nous en voyons, dit Rohrbacher, des traces dans l’ancien Testament. Les enfants des prophètes, qui, sous la direction d’Élie et d’Élisée, vivaient en commun dans les déserts ou sur les bords du Jourdain, étaient les moines et les cénobites d’Israël. Dans l’Église chrétienne, cette tendance à se retirer du monde pour vivre dans le calme de la solitude s’est manifestée dans tous les temps. Dès les premiers siècles, sous le nom d’ascètes, les âmes d’élite se réunissaient en plus ou moins grand nombre, soit à la ville, soit à la campagne, pour vaquer plus efficacement à la perfection. Cette tendance, augmentée par la persécution des idolâtres, et peut-être aussi par la vie peu édifiante de bien des chrétiens du monde, peupla plus tard les déserts d’Égypte, de Palestine et de Syrie. » (Vol. 9. p. 73)

« Dans les règles que Saint-Basile le Grand, de concert avec son ami Saint-Grégoire de Nazianze, dressa pour ses moines, il les appelle philosophes, et leur état philosophie. Saint-Chrysostome et plusieurs autres tiennent le même langage. Quelque étrange que nous paraisse cette acception des mots philosophie et philosophes, elle est cependant conforme et à la philosophie humaine et à la philosophie divine. Socrate et Platon nous disent que la philosophie consiste dans la méditation de la mort, afin de détacher son âme des liens terrestres et de l’élever aux choses intellectuelles, et de celles-ci à Dieu, le souverain être, la souveraine intelligence, le souverain bien ; finalement, que la vraie philosophie consiste à devenir semblable à Dieu par la pratique de la vertu, à l’aimer par-dessus toutes choses et à en être aimé. Or, voilà toute la vie chrétienne et, plus encore, voilà toute la vie monastique. Et en cela elle a pour modèle la sagesse même ; non pas une sagesse abstraite, purement idéale, mais la sagesse réelle et vivante, la sagesse éternelle et divine, revêtue de la nature humaine, pour se mettre mieux à notre portée et nous rendre plus facile la ressemblance avec Dieu. » (Vol. 6. p. 437.)

« Sans nous arrêter aux mots, allons au fond des choses. Quand les philosophes de l’antiquité nous tracent d’imagination le portrait de leur sage ; quand ils nous le montrent supérieur au plaisir et à la douleur du corps, supérieur aux honneurs et aux richesses du monde, supérieur à l’inconstance naturelle de l’homme, et suivant en tout la raison et la sagesse, ne font-ils pas le portrait du vrai moine, qui, par les vœux de religion, s’élève pour jamais au-dessus des plaisirs et des richesses, au-dessus de sa propre inconstance, en se mettant dans l’heureuse nécessité de faire toujours, dans la volonté de son supérieur, la volonté de Dieu, c’est-à-dire ce qui est parfait. Les efforts des philosophes pour mettre leurs idées en pratique, n’ont-ils pas été des essais informes et avortés de la vie monastique ? Les Pères de l’Église n’ont-ils pas eu raison par conséquent de dire que la vie monastique était la vraie philosophie ? » (Vol. 9.)

« Les premiers moines, ou hermites, dit un autre auteur, furent, selon Eusèbe, Cassien et Sozomène, les thérapeutes, qui s’établirent sur les bords du lac Mœris en Égypte, après la fondation de l’Église d’Alexandrie par Saint-Marc. »

« Avant eux, plusieurs saints personnages avaient également donné l’exemple d’une retraite absolue et du détachement des choses terrestres. Le prophète Élie (3. Rois 19.) fuyant la corruption d’Israël ; après ce prophète, Élisée, son serviteur (4. Rois 11.) ; Saint-Jean-Baptiste, fixant sa demeure sur les bords du Jourdain (St-Math. 13.) ; Jésus-Christ lui-même, se retirant sur les montagnes, pour prier, (St-Math. 4.) étaient des exemples assez grands et assez frappants, pour inspirer aux premiers chrétiens le désir de la vie monastique et le courage nécessaire pour s’arracher aux plus tendres nœuds et aux plus douces affections. »

« On regarde généralement Saint-Antoine, Saint-Paul et Saint-Pacôme, comme les premiers solitaires et comme les fondateurs des Ordres religieux. »

« Ces institutions furent, dès leur ori-