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Page:Rousse - Mirabeau, 1891.djvu/31

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MIRABEAU.

« Ruminez ceci, c’est écrit en cinq jours, mais pensé pendant des années ».

Ce que le petit Mirabeau devait « ruminer » en venant au monde, c’était un énorme traité sur les droits et les devoirs des seigneurs, où ce seigneur intraitable accablait de ses railleries les « préposés de la cour », c’est-à-dire les intendants de province établis par Richelieu, « l’autorité puante, la paresse de cette clique,… cette sorte de magistrature informe et monstrueuse qu’on a donnée à des gens aussi fripons qu’avantageux, et l’apparence de crédit que semblent avoir ces gens-là…. Appliquez-vous attentivement et sourdement à les perdre, dit-il à son fils, écrasez le scorpion et n’en approchez pas. »

En 1750 paraissait, sans nom d’auteur, un ouvrage qui fit grand bruit ; c’était un mémoire sur les États provinciaux, dans lequel, prenant sur les esprits les plus hardis de son temps une avance de plus de vingt années, le marquis de Mirabeau combattait à outrance la centralisation du pouvoir ; organisant à sa façon les pays d’élection et les pays d’états ; professant le doublement du Tiers « qui est de droit, dit-il, puisque c’est lui qui porte le poids principal des charges », et la délibération par tête, conséquence nécessaire du doublement.

« Le doublement du Tiers, le vote par tête !! » Le marquis de Mirabeau écrivait ces mots en 1750, quarante ans avant le serment du Jeu de Paume. On sait comment, le 23 juin 1789, l’orateur du Tiers--