Aller au contenu

Page:Rousse - Mirabeau, 1891.djvu/79

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
71
MIRABEAU.

étude ont tranché d’ailleurs un peu vite une question assez douteuse. Elle vaut la peine qu’on l’examine.

À vingt ans, en revenant d’Ajaccio, le jeune lieutenant avait lu à son oncle une histoire de la Corse qu’il avait composée, disait-il, dans les loisirs de cette courte campagne, et qui avait émerveillé le digne bailli. De cette première œuvre il n’est rien resté, si ce n’est le soupçon d’une audacieuse supercherie, d’un de ces plagiats effrontés qui devaient faire si souvent le fond de ses écrits et le dessous de ses discours.

Peu de temps après, à Manosque, au moment où il venait de se colleter avec le comte de Villeneuve, il écrivait tout d’un trait une grosse brochure, l’Essai sur le despotisme.

« Je me repens, a-t-il dit plus tard, d’avoir mutilé un si beau sujet. » C’est ce sujet lui-même qu’il est difficile de bien saisir, à travers les citations et les digressions sans nombre sous lesquelles il le faut chercher.

Au début, c’est un traité de philosophie politique à la mode du temps, où résonnent des dissertations creuses « sur l’homme naturel, sur l’homme social », et sur l’origine des communautés humaines : une réfutation du Contrat social par un élève de Jean-Jacques….

L’homme « naturellement bon » a, naturellement aussi, « le désir et l’instinct du despotisme » ; cet instinct, « qui est le vœu constant de l’humanité », il le porte dans tous les gouvernements qu’il s’est