Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t14.djvu/169

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

société ne seroit-elle pas plongée ? Il n’y a personne qui ne fût exposé aux traits les plus envenimés des calomniateurs, autant vaudroit-il aller égorger un homme dans ton lit.

Un sage a dit, avec bien de la raison, que tout homme, qui en pareilles occasions se tient derriere le rideau & garde l’anonyme, ne doit point être cru. J’ai oui répéter cela, après ce sage, plus d’une fois à M. Rousseau, à qui du reste je n’impute rien, quant à ce libelle ; ce seroit lui faire outrage, & je suis persuadé, si j’ai bien cru connoître M. Rousseau en ceci, pendant que je l’ai fréquenté, qu’il ne sait pas gré à l’anonyme de la façon peu ménagée dont il a plaidé sa cause.

Je ne dois pas me mettre beaucoup en peine de connoître l’auteur de ce libelle ; je ne le desire pas même, & je ne dirai point avec un célebre Auteur moderne : c’est un tel, je l’ai reconnu d’abord à son style pastoral. J’abandonne au public le soin de porter ton jugement.

Vous me demandez des éclaircissemens. Vous estimez, avec raison, que l’honneur de la religion, celui de notre compagnie, & le mien propre l’exigent absolument. Je mettrai donc la main a la plume.

Je ne crains point de me nommer, ni de nommer les personnes qui peuvent être intéressées dans cette affaire, parce que je n’exposerai rien qui ne soit exactement vrai, & que d’ailleurs je me serai une regle d’écrire avec la plus grande modération, si conforme au glorieux caractere que je porte, & à mon caractere personnel. Et quoique l’anonyme cherche à me noircir, à me représenter comme un intolérant, un persécuteur, & à faire de moi le portrait le plus odieux,