Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t14.djvu/511

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mais la preuve évidente : étoit-ce à vous à emboucher la trompette pour publier vous-même, que l’Angleterre s’honoroit d’être votre refuge, qu’elle en glorisioit avec justice ses Loix & son Gouvernement ? Ne diroit-on pas que J. J. Rousseau étoit d’une trempe si parfaite, qu’il falloit que tout un royaume se fît un honneur particulier de l’accueillir & de le protéger !

Pouvons-nous, mon cher confrere, nous autres pauvres barbouilleurs de papier, pouvons-nous, dis-je, sans égarement, nous servir du langage des maîtres de la terre, ou des héros fugitifs & injustement persécutés, à moins que ce ne soit pour faire parler ceux que nous saisons sortir de la coulisse ? Malgré tout l’honneur que l’Angleterre s’étoit fait de vous recevoir, les papiers publics qui s’étoient empressés de chanter vos louanges, sifflent tout-à-coup la palinodie ; cela est bien dur j’en conviens, sur tout pour ces petits génies qui ne pensent qu’à eux-mêmes ; mais pour les ames fortes toujours occupées des choses au-dessus du commun, ces revers ou plutôt ces petits traits de lâcheté littéraire sont des piqûres si légeres, qu’à peine ont-elles le tems de les sentir. Dites-moi, dans laquelle de ces deux classes voulez-vous que l’on vous place ?

Tout ce que vous dites encore sur l’accueil que vous fit un grand Prince à Paris ; sur le peu d’empressemens que l’on fit de continuer à vous fêter, après que l’on vous eût étudié à Londres ; sur le manque de politesse de certains particuliers à votre égard ; sur les flagorneries de M. Hume, qui plaçoit exprès votre Héloïse sur sa table ; sur la visite de M. Penneck ; sur votre bourse qui n’étoit pas vide, & sur la maniere de vous faire l’aumône, de maniere à vous en sauver l’embarras, ne