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Page:Roussel - Impressions d Afrique (1910).djvu/388

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vif sans paraître hésiter sur la direction à suivre.

Après une assez longue étape, il s’arrêta au bord d’une source en un lieu pittoresque et charmant.

Skazioffszky connaissait déjà cet endroit d’isolement et de mystère ; un jour il avait même tenté de se baigner dans le ruisseau limpide, qui coulait avec mille reflets sur de brillantes roches micacées ; mais, à sa grande surprise, il n’avait pu vaincre la résistance de l’eau, dont la prodigieuse densité empêchait toute pénétration un peu profonde ; s’affalant alors sur les genoux et sur les mains, il était parvenu à franchir en tous sens la pesante rivière sans humecter son corps soutenu au-dessus de la surface.

Négligeant cette fois l’étrange cours d’eau, Skarioffszky s’empressa d’installer cithare et support devant une roche basse pouvant servir de siège.

Bientôt, assis devant l’instrument, le virtuose se mit à jouer lentement certaine mélodie hongroise empreinte de tendresse et de langueur.

Au bout de quelques mesures, bien que très absorbé par le va-et-vient de ses baguettes, Skarioffszky eut l’intuition visuelle d’un mouvement léger s’accomplissant du côté de la rivière.

Un rapide coup d’œil lui permit d’apercevoir un ver énorme, qui, sortant de l’eau, commençait à ramper sur la berge.