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Page:Roussel - La Vue, 1904.djvu/144

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Il voit le monde entier bon, charitable, intègre ;
Sa foi dans le dernier qui lui parle est célèbre ;
On en profite pour lui jouer tous les jours
Sans le fâcher les plus abominables tours ;
Comme il prend tout ce qu’on dit au pied de la lettre,
On peut, sans se donner grand mal, lui faire admettre
Les contes les plus fous, les plus extravagants ;
On lui débite des histoires de brigands
Qui vous envoient d’un coup au cœur dans l’autre monde,
Et dont la vue, au coin d’un sentier, vous inonde
De sueur froide ; dans sa confiance il croit
Aux secrets que chacun sait par son petit doigt ;
Il ne connaît pas la malice ; il exagère
La bonne qualité d’être ouvert et sincère ;
Les paroles pour lui ne sont pas des rébus
Au sens caché qu’il faut déchiffrer.

L’omnibus,
Quoique très dégagé, n’est pas encore vide ;
Une femme hésitante, inquiète, timide,