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Page:Roussel - La Vue, 1904.djvu/201

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Voulant conduire à tout prix ses filles au bal ;
Elle leur dicte leurs rôles, se décarcasse,
Trouve, quand il le faut, spirituel, cocasse,
Le candidat le plus gauche, le plus serin ;
Elle, ordinairement revêche comme un crin,
Découvre toutes ses dents, cajole, embobine,
Se sert de l’infaillible amour-propre, combine
De longs rapprochements qui tous sont les produits
De ses manœuvres, bien que paraissant fortuits.
Elle excelle à courir à la fois plus d’un lièvre
Et ménage tantôt le chou, tantôt la chèvre.
Chaque fois que ses plans avortent, sont déçus,
Son caractère éclate et reprend le dessus ;
Elle serre les poings, peste. Sa fille aînée
Ne respire qu’avec contrainte ; elle est gênée
Dans son corset, voulant au moins dissimuler
Ou même, si c’est en son pouvoir, annuler
Un embonpoint qui la désole ; l’épouvante
De la graisse la suit dans son sommeil, la hante.
Elle surveille son tour de taille de près,