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Page:Roussel - Le Bouddhisme contemporain.djvu/97

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a obtenu un succès légitime et durable[1]. L’auteur (1813-1860) séjourna cinq ans dans les monastères de Mongolie où il apprit à fond les dialectes et les croyances des pays qu’il voulait évangéliser et non visiter seulement en explorateur, rôle cependant auquel il dut le plus souvent se borner, sans qu’il s’en contentât jamais. Avec son confrère Gabet il adopta le costume des lamas, leurs manières de vivre, tout leur extérieur, en un mot, et parvint jusqu’à Lha-Ssa, la ville interdite où il put séjourner quelques semaines avec l’autorisation du régent. Bientôt les autorités chinoises, alarmées de la présence de ces étrangers, les forcèrent de quitter, non seulement la ville, mais le Tibet même.

La véracité de M. Huc dont le style, tout en restant simple, est pittoresque et spirituel essentiellement, mise en doute par certains contradicteurs, a été hautement proclamée par d’autres voyageurs, tels que Mark Bell et Rockhill, outre Bonvalot et le prince d’Orléans, qui ont rendu pleine justice au missionnaire et à la sûreté de ses informations[2]. Le temps n’a rien ôté de sa valeur à ce très remarquable ouvrage, le lamaïsme, figé depuis des siècles, étant resté absolument le même. Depuis nos deux Lazaristes jusqu’à ces dernières années, nul voyageur n’avait pu entrer dans Lha-Ssa, ni Prjévalsky, ni Bonvalot et le prince d’Orléans (1889), ni Dutreuil de Rhins et Grenard (1893-1894), ni Littledale (1895), ni Sven-Hédin lui-même (1906)[3].

En 1897, le journaliste Savage Landor, parti de Londres

  1. Les nombreuses citations que je lui emprunte se rapportent à la cinquième édition (1868). 2 vol. in-12. Paris, Gaume.
  2. En parlant de Hue et de Gabet, M. Bonvalot s’exprime ainsi : « Pour notre compte, nous trouvons qu’ils ont fait en Asie le plus extraordinaire, le plus audacieux, le plus intéressant des voyages, n’ayant à peu près comme ressource que leur bonne volonté et leur énergie. » (De Paris au Tonkin, à travers le Tibet inconnu, par Bonvalot, 1889-1890, publié dans le Tour du Monde, tome LXII. 1891, 2e semestre, p. 402 et suiv.)
  3. On raconte que l’Anglais Moorcroft se rendit de Ladak à Lha-Ssa, en 1826, y séjourna douze ans, sous un costume