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Page:Roussel - Locus Solus, 1914.djvu/262

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cruelle joie de voir une existence mensongère déroidir un moment le corps de son fils.

Une émotion poignante s’empara de la malheureuse quand elle comprit que l’enfant revivait les minutes où, pour lui souhaiter sa dernière fête, il avait, assis sur ses genoux, récité, en la fixant tendrement, le Virelai cousu de Ronsard.

En cette œuvre qui atteint l’absolue perfection — touchant hymne d’amour filial qu’un oiselet, exaltant les bienfaits reçus à toute heure, est censé adresser à sa mère — le poète obtient d’intensives expressions de pensées, dues à une précision lapidaire dans l’agencement des mots. Or, au XVIe siècle, les termes cousu et décousu s’appliquaient tous deux au style, soit marmoréen, soit relâché, alors que le dernier seul, de nos jours, garde encore son sens figuré. De là le surnom admiratif spontanément décerné par les masses, dès son apparition, au célèbre virelai en cause, chef-d’œuvre de cohérente concision.

Tant de recherche et de densité rendant les vers durs à retenir, Hubert Scellos, pour tout se mettre en tête, avait fourni de violents efforts