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Page:Routhier - À travers l'Europe, impressions et paysages, Vol 1, 1881.djvu/345

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PARIS

Gérald qui aime à guerroyer contre les ennemis de la France taille en pièces une troupe de Saxons, fait leur chef prisonnier, et délivre une jeune fille française qu’ils emmenaient captive. Il conduit la belle étrangère au château, et vous comprendrez son émotion, et l’émotion bien plus grande encore de son père, lorsque la jeune fille leur apprend qu’elle se nomme Berthe, fille de Roland, élevée à la Cour de Charlernagne !

Roland ! s’écrie Gérald enthousiasmé,

« Roland fut mon héros, mon idéal suprême ;
« Il me semblait — je sens mon orgueil aujourd’hui —
« Que quelque chose en moi me rapprochait de lui ;
« Dans mes rêves d’enfant en lui je croyais vivre ;
« Il me semblait du moins le voir, l’aimer, le suivre,
« Dans sa gloire éclatante et dans ses fiers travaux ;
« Et comme lui tomber aux champs de Roncevaux !
« Ah ! vous l’avez bien dit tout à l’heure : sa fille,
« Nous la saurons défendre, et, dans notre famille,
« Parmi nos gens, mon père, et dans notre maison,
« Elle ne trouvera jamais de Ganelon ! »

Je vous laisse à juger des blessures profondes que ces paroles du fils rouvrent dans le cœur du père ; il se retire plein d’angoisses, et tous les jours ce sont de nouvelles tortures, au souvenir de l’ancien crime. Un soir, dans un banquet donné par Amaury, on boit à Charlemagne, et à Roland, puis toutes les mains se lèvent, celles de Gérald avec les autres, pour maudire Ganelon !

Mais la douleur d’Amaury grandit encore, quand au moment de repartir pour Aix-la-Chapelle, Berthe