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LE CENTURION

Voilà l’homme qui a osé se dresser en face d’Hérode Antipas. Dans les synagogues, aux bords du Jourdain, et sur les grèves mêmes de Tibériade, partout où sa prédication attirait la foule, Jean lançait les plus terribles anathèmes contre le roi et sa vie scandaleuse.

Les gardes du palais l’ont arrêté, et traduit devant Hérode. Mais, là, en présence des courtisans et d’Hérodiade, tout frémissant d’indignation il a continué d’accuser, au lieu de s’excuser, et il a dit au couple royal : « Votre conduite est criminelle. »

La reine indignée, a voulu que Jean fût immédiatement mis à mort ; mais le roi n’a pas voulu, et il a fait conduire le prisonnier au donjon de son château de Machérous, au fond des montagnes de Moab, dans la Pérée.

Je revenais hier de faire une course au sud de Tibériade, qui est à six milles de Magdala, et j’arrivais aux portes de la ville lorsque j’ai rencontré le malheureux prophète traîné par les soldats galiléens.

Il avait la tête et les pieds nus, et il portait un vêtement grossier en poil de chameau. Mais sa chevelure flottait au vent dans une espèce d’auréole lumineuse, et ses yeux levés vers le ciel lançaient des éclairs.

Les soldats le bafouaient et l’injuriaient, mais il paraissait ne pas les entendre. Sa bouche éloquente qui a soulevé tout un peuple était close à jamais peut-être.