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LE CENTURION

Comme lui, le fils de David avait trahi son père et son roi, et comploté sa mort. Mais Jéhovah l’avait châtié, et peu de temps après, on l’avait trouvé pendu aux branches d’un térébinthe sur le bord du Cédron.

Un rejeton du même arbre était encore là, et on l’appelait le térébinthe d’Absalon.

Judas frissonna de la tête aux pieds. L’air était froid, et le soleil, à peine levé, se cachait derrière le mont des Oliviers. Le maître est en ce moment devant Pilatus, se dit Judas, et peut-être la sentence de mort est déjà prononcée contre lui. Il se leva et gravit lentement les hauteurs du mont Sion. Arrivé au bord de l’escarpement de la Géhenne, il s’arrêta et plongea ses regards dans l’abîme.

Au fond s’élevait jadis la statue d’airain de Moloch auquel on offrait des victimes sanglantes et même des sacrifices humains. La statue avait disparu ; mais l’abîme était resté lugubre, et invitait au suicide.

Un moment le traître eut la tentation de s’y précipiter ; mais non ; il remonta le mont Sion, puis redescendit vers le midi. Il traversa l’Hinnom, et s’arrêta dans le champ d’un potier, jadis un jardin ombragé, qu’il avait rêvé d’acheter avec le prix de sa trahison pour s’y bâtir une demeure. Un grand sycomore y dressait vers le ciel ses longues branches. Judas s’assit au pied, prit sa tête dans ses mains, et s’efforça de rassembler ses idées.