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LE CENTURION

la lui enseigner ; mais ses études, et l’expérience de la vie, l’avaient conduit au scepticisme.

Aussi, leva-t-il les épaules, en entendant les dernières paroles de Jésus ; et avec un sourire amer, il dit : « Qu’est-ce que la Vérité ? »

Ce n’était pas une question qu’il posait à l’accusé parce qu’il était convaincu, que ni lui ni d’autres ne pouvaient lui dire en quoi consistait la Vérité. C’était son doute universel qu’il exprimait sous cette forme interrogative ; et ce que son altitude et sa phrase disaient à Jésus signifiaient ceci : vous êtes un naïf, et si la Vérité existe, personne ne la connaît.

Le gouverneur se leva, et marcha pendant quelques minutes, les mains derrière le dos. Il ne savait que faire. Il aurait bien voulu sauver Jésus. Mais il ne voulait pas se créer d’embarras, en irritant les Juifs. S’il avait eu des notions exactes de droit et de justice, il aurait libéré son prisonnier, sans se préoccuper des conséquences. Mais il avait surtout le souci de son intérêt, et de ses rêves ambitieux ; et pour aucune considération il ne voulait risquer de perdre sa position et compromettre son avenir. Il chercha divers expédients, et voulut tenter d’apaiser la foule. Il sortit donc, et dit aux Juifs : « Quant à moi, je ne trouve aucun crime en lui. »

Cette déclaration fut accueillie par des cris de rage et les Sanhédrites rangés au pied du portique, protestèrent et renouvelèrent leurs accusations.