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LE CENTURION

« Après tous ses travaux, ses prédications, ses courses, ses prétendus miracles, que lui reste-t-il ? Rien. Qu’a-t-il fondé ? Rien. Son dénûment est complet. Sa ruine est totale, définitive, et il va rentrer dans le néant d’où il est sorti.

« Il n’a pas un coin de terre lui appartenant, pas un meuble, pas un denier, pas le moindre souvenir qu’il puisse léguer à ses amis.

— « Ses amis ! Il n’en a plus. Ceux qui le suivaient l’ont abandonné ou trahi… »

Tout cela était vrai, et ce n’était pas tout.

Jésus avait au moins des vêtements. Il n’en a plus, on l’en a dépouillé ; les soldats les ont partagés entre eux, et comme sa tunique ne pouvait pas être divisée, ils l’ont tirée au sort !

Jésus avait la réputation d’être un sage, et un savant ! On le regarde maintenant comme un insensé. Il semble avoir perdu l’usage de la parole, et il a été incapable de se défendre devant les tribunaux. Son renom de sainteté même est perdu, puisqu’il vient d’être condamné par la justice comme un scélérat.

Jésus était un thaumaturge, comme le monde n’en avait jamais connu. Il est maintenant réduit à l’impuissance la plus complète. Il a perdu le sentiment de sa propre conservation.

Il était le plus beau des enfants des hommes. Et maintenant, regardez-le : couvert de plaies, défiguré, il est hideux à voir.