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partage, & le couvain, quelque tendresse qu’elles aient pour lui.

Lorsqu’on a découvert la ruche qui possède la reine, on la transporte à une vingtaine de pas sur une autre table, & on met sur la sienne celle qui en est privée. Cette ruche orpheline reprend courage, se met au travail, & forme une jeune reine qui sera prête à pondre dans trois semaines : souvent il en vient plutôt, si parmi le couvain qu’elles ont, il s’y trouve des cellules royales. Par ce moyen, le nombre des abeilles augmente beaucoup par celles de la ruche transportée, qui reviennent en foule à leur ancienne place, guidées par l’habitude & attirées par le couvain qui éclôt tous les jours.

On peut chaque année former des essaims, en séparant, de la manière qu’on l’a dit, les ruches qui sont assez fortes pour ne souffrir aucun dommage de cette opération, qu’on fait plutôt ou plus tard relativement à l’état particulier de chaque ruche, & selon que la première ponte a été plus ou moins favorable à la multiplication.

On ne doit point transporter la ruche dans laquelle on a découvert qu’habitoit la reine, à une lieue ou deux, ainsi que le conseillent quelques auteurs dans la méthode qu’ils donnent de former des essaims artificiels par la division des ruches. Cette distance seroit trop considérable ; les abeilles ne reviendroient point à leur premier emplacement pour augmenter le nombre de celles qui sont privées de la reine.

La méthode de M. de Gélieu, justifiée par l’expérience, est fondée sur deux principes évidens, dont il est aisé de s’assurer soi-même. » 1o. Les abeilles qui n’ont point de reine, ne fussent-elles qu’au nombre de sept à huit cents, peuvent toujours s’en former une, quand elles ont du miel, de la cire brute & trois sortes de couvains ; savoir, des œufs, des vers & des nymphes ». Ce principe est si vrai, qu’en le suivant l’on forme des milliers d’essaims artificiels toutes les années dans les cercles de Haute & Basse-Saxe, & surtout en Lusace. M. Schirach est le premier qui en ait fait usage ; il l’a fait avec un si grand succès, qu’on s’est empressé partout de le répéter : M. de Gélieu a le mérite de l’avoir mis à portée de tout le monde, en le simplifiant de telle manière, qu’il n’est pas d’habitant de la campagne qui ne puisse aisément le réduire en pratique, en suivant les procédés qu’il indique pour cet effet.

 » 2o. Les abeilles placent toujours leur miel au haut de la ruche, le couvain dans le milieu, & les gâteaux de cire en bas ». Cette règle, qu’elles suivent constamment, ne souffre d’exception que dans deux circonstances : 1o. dans le tems de leur plus grande récolte ; alors elles placent leurs provisions dans toutes les cellules vuides, quelque part qu’elles soient ; 2o. quand la reine est dans le fort de sa ponte ; ses œufs se trouvent alors presque partout. Par conséquent, en formant des essaims par le partage des ruches, selon les procédés de M. de Gélieu, on est assuré qu’il y aura du couvain dans les deux demi-ruches. Au contraire, quand on divise les ruches