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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1781, tome 1.djvu/271

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culture ; si leurs vues sur l’agriculture étoient liées avec les vues politiques du gouvernement ; enfin, en quoi consistoit leur agriculture.


CHAPITRE PREMIER.

Ce que les Romains ont fait pour l’agriculture.

Il faut distinguer deux époques. La première comprend depuis la naissance de l’empire jusqu’au milieu du septième siècle ; & dans cet espace de tems, il paroît que le régime s’est occupé de l’agriculture. La seconde, depuis cette époque jusqu’à l’asservissement de la république sous le sceptre des Césars, c’est-à-dire, du tems où le régime ne s’occupa plus de l’agriculture.

Romulus divisa le territoire de la république en trente portions égales. Il en donna une à chaque curie, & les trente curies formèrent les trois tribus. Une certaine étendue de terrain fut réservée pour le service des dieux & les besoins de la patrie.

Tous les chefs de famille de chaque curie eurent, suivant leur rang, un certain nombre de journaux de terre, & les plus pauvres en eurent deux. La loi rendit ces deux journaux indivisibles ; & cette loi subsista, dans toute sa force, jusqu’à l’an 385 de Rome. Le journal romain étoit à peu près les sept huitième de l’arpent de Paris, c’est-à-dire que le journal contenoit 18 000 pieds quarrés, tandis que l’arpent de Paris en contient 32 400.

Par une fatalité commune à tous les pays, les riches absorbèrent peu à peu le patrimoine des pauvres, & il en sera toujours ainsi. Le peuple ne pouvant subsister par le produit de deux journaux, se plaignit, demanda un nouveau partage des terres ; il fallut dépouiller ceux qui en avoient trop concentré dans leurs possessions, & faire de nouvelles conquêtes. Après celle des Vèges, le sénat, à l’incitation de l’intrigant Licinius Stolo, régla à sept journaux par tête la division du territoire conquis, pour être donnés au peuple. Comme Licinius Stolo n’étoit pas animé de l’esprit patriotique, il viola bientôt la loi qu’il fit promulguer, & il en fut puni. Au contraire, Curius, le vainqueur de Samnium, refusa les cinquante arpens que la république lui accordoit par reconnoissance, disant qu’il falloit être un pernicieux citoyen pour ne pas être satisfait de ce qu’elle accordoit aux autres. Le même Licinius fit défendre, par une autre loi, de posséder plus de cinq cents arpens.

La loi, ainsi que toutes celles qui répriment l’avidité, ne restent jamais long-tems sans transgression, & deviennent nulles, lorsqu’elles ne sont pas étroitement liées avec le systême politique du gouvernement. En effet, en 454 & 461, on voulut les faire revivre ; plusieurs citoyens furent condamnés, pour avoir en propriété un nombre de journaux plus fort que celui permis par la loi. À la fin, elle fut violée & méprisée publiquement, & les possessions des particuliers qui eurent part à l’administration devinrent immenses.

L’estimable & le savant auteur des Recherches historiques & critiques sur l’administration publique & privée des terres chez les romains, fait à cette occasion une remarque bien judi-