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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1781, tome 1.djvu/398

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Section II.

Des Alambics pour la distillation des lies.


Tous les alambics dont on vient de parler, peuvent servir à la distillation des lies.

Leur distillation offre deux grands inconvéniens. Le premier, lorsque l’on donne une chaleur assez forte pour en dégager les parties spiritueuses, il se forme une écume considérable qui passe souvent par les jointures & par le bec de l’alambic. Le second, vient de la croûte qui s’attache contre les parois de l’alambic, & qui les corrode.

Pour prévenir ces inconvéniens, M. Devanne, maître en pharmacie à Besançon, propose une machine assez simple, déjà décrite dans le Recueil des Mémoires sur la distillation des vins, publié par la société d’agriculture de Limoges.

Cette machine est composée d’une crapaudine en fer, attachée au centre du fond de l’alambic ; sur cette crapaudine est appuyé un pivot aussi en fer, qui s’élève jusqu’au dessus du chapiteau de l’alambic, duquel sort la manivelle pour faire tourner ce pivot. À trois pouces de distance de la crapaudine, sont attachés au pivot deux ailes en cuivre ou en bois, dont l’une intérieure est recourbée en contre-bas, & le dessous de l’aile de la supérieure est à niveau du dessous de la supérieure, & est droite. Le haut du pivot doit être garni de filasse graissée, non-seulement pour tourner plus facilement dans la goupille qui est arrêtée au haut du chapiteau, mais encore pour empêcher qu’il ne se dissipe aucune vapeur. La manivelle fournit, par ce moyen, un mouvement suffisant pour prévenir les inconvéniens dont on a parlé, parce que le mouvement porte le fluide visqueux du centre à la circonférence, & de la circonférence au centre.

Un procédé plus simple est celui des vinaigriers de Paris. Ils tiennent les lies qu’ils rassemblent, dans de grands vaisseaux bien bouchés, & ces vaisseaux sont placés dans une étuve, de manière que tout le fluide visqueux est peu à peu pénétré par la chaleur. Après quelques jours, ils tirent par la cannelle tout le vin clair qui peut couler, & placent ensuite dans des sacs ces lies déjà échauffées. Ces sacs sont sous le pressoir entre deux platines de fer ou de fonte, elles-mêmes fort échauffées ; alors le fluide vineux s’échappe à travers la toile ; enfin, il est aussitôt porté dans l’alambic pour être distillé. Le résidu des lies est vendu aux chapeliers pour feutrer les chapeaux, ou il est brûlé pour en faire la cendre gravelée.

Pour empêcher les lies de monter en écume dans les alambics, il suffit, avant la distillation, de jeter quelques gouttes d’huile dans l’alambic, & distiller un peu lentement.

Dans les grandes brûleries, il faut avoir un alambic consacré uniquement à la distillation des marcs & des lies, sur-tout si on les travaille à feu nud : trois distillations consécutives de bon vin ne suffiroient pas pour les dépouiller de leur mauvais goût, quoique l’esprit ardent qu’on en retireroit en fût lui-même très-vicié. En général, ce