Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1781, tome 1.djvu/460

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

fossés remplis d’eau, jusqu’à ce que cette eau soit suffisamment chargée de sel ; alors on la filtre & on la verse dans des bassins de plomb enfoncés dans la terre. La chaleur souterraine fait évaporer une partie de l’eau ; & lorsqu’elle est au point nécessaire, on la filtre de nouveau, & on la verse dans des vaisseaux de bois pour la faire cristalliser. Les cristaux sont blancs & transparens comme ceux d’Angleterre & du pays de Liège. Ceux qui seront curieux de connoître la manière d’exploiter les mines d’alun, usitée dans les différentes parties du globe, peuvent consulter le Dictionnaire Encyclopédique, au mot Alun ; ces détails sont étrangers à notre objet.

L’alun de Rome est rougeâtre : on l’appelle improprement alun de roche, parce qu’on le tire d’une pierre fort dure près de Civita-Vecchia. L’alun de plume prend ce nom, parce que ses filets déliés ressemblent à la barbe d’une plume.

Il est inutile de parler ici des quatre espèces artificielles d’alun qu’on prépare assez inutilement dans les boutiques.

Propriétés. On emploie plus communément, en médecine, l’alun de Rome que les autres : celui-ci est particulièrement détersif, dessiccatif & styptique ; sa dose, pour l’homme, est depuis une demi-drachme jusqu’à une drachme ; & pour l’animal, depuis quatre grains jusqu’à trente.

Les auteurs ne sont point d’accord entr’eux sur l’usage qu’on doit faire de l’alun, & sur les cas où il convient de l’employer intérieurement. Cette incertitude prouve au moins qu’on ne doit pas le prescrire sans avoir auparavant bien examiné l’état du malade.

« L’alun, disent les uns, arrête toutes les hémorragies en général, soit internes, soit externes ; ainsi, il peut être prescrit avec succès dans les écoulemens du sang, causés par l’ouverture de quelques vaisseaux dans les premières voies, dans les crachemens & vomissemens de sang, dans le flux des urines ensanglantées, dans toutes les pertes de sang qui arrivent aux femmes en quelque tems qu’elles leurs surviennent, pendant leur grossesse & après l’accouchement, Quelques-uns prétendent, continue le même médecin, qu’il est dangereux d’arrêter le sang par l’usage des astringens ; préjugé d’autant plus mal fondé à l’égard de l’alun, qu’il est détruit par l’expérience ; ce remède n’entraîne jamais de suites fâcheuses, pourvu néanmoins que les vaisseaux aient été suffisamment désemplis, ou par les pertes de sang, ou par les saignées. Lorsque la perte de sang sera arrêtée, ce qui arrive ordinairement après la huitième ou dixième prise, on diminuera insensiblement pendant un mois l’usage de l’alun. »

M. Vitet, dans sa Pharmacopée de Lyon, répond négativement aux éloges qu’on a donnés à l’alun pour plusieurs maladies. C’est lui qui parle : « Il est rare que l’alun soit utile dans l’hémoptysie occasionnée par un effort, l’hémoptysie par pléthore, & l’hémorragie utérine par pléthore ou par blessure. Toutes les autres espèces de maladies évacuatoires en éprouvent de mauvais effets ; il cause