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en état de recevoir un nouvel hôte.

Les mâles & les femelles subissent les mêmes métamorphoses que les ouvrières, avec cette différence, que la femelle sort assez ordinairement de sa cellule en volant, parce qu’étant beaucoup plus spacieuse que les autres, elle a pu, quoique captive, y déployer ses ailes ; ce que ne peuvent faire les ouvrières ni les mâles qui sont trop à l’étroit dans la leur. Quand une fois le couvain a commencé à éclore, les abeilles ne tardent pas à sortir de leur prison : tous les jours on en voit paroître des centaines de jeunes qui augmentent considérablement la population d’une ruche, qui est obligée ensuite d’envoyer des colonies, l’habitation se trouvant trop petite pour un si grand nombre d’abeilles.


Section VI.

À quelles marques distingue-t-on les jeunes Abeilles des vieilles, & quand est-ce qu’elles commencent à travailler.


C’est à la couleur des abeilles qu’on peut connoître leur âge : les anneaux de celle qui vient de quitter la dépouille de nymphe sont bruns, & les poils qui les recouvrent, ainsi que ceux des autres endroits de son corps, sont blancs, ce qui la fait paroître d’une couleur grise. À mesure qu’elles vieillissent, leurs anneaux ne sont point si bruns, & leurs poils deviennent roux, ce qui les fait paroître alors d’une couleur rousse.

Les divers talens qu’on admire dans les abeilles, ne sont point le fruit de leur éducation ; elle n’a d’autre but que le prompt accroissement de l’individu ; ils naissent avec elle ; l’usage qu’elles en font, les développe & les fait paroître. Dès qu’une abeille a brisé les fers de sa captivité, elle a toutes les connoissances nécessaires pour travailler au bien commun de la société, soit en donnant à la famille qu’on élève continuellement, les mêmes soins qu’on a eus pour elle pendant son enfance, soit en se livrant aux différentes occupations qui sont utiles dans la république : au bout de sa carrière elle ne sera pas plus instruite qu’elle l’étoit au commencement. À peine est-elle sortie de sa cellule, qu’elle est donc en état de travailler & d’imiter ses compagnes dans les ouvrages de leur industrie ; elle va comme elles moissonner les richesses des fleurs, sans qu’il soit nécessaire qu’on lui apprenne dans quels endroits & sur quelle espèce de plantes elle doit diriger son vol pour recueillir la cire & le miel : elle n’a pas besoin qu’un guide la ramène dans l’habitation où elle est née ; elle va seule faire sa récolte, & revient sans se tromper dans l’endroit où sont les magasins où elle doit la déposer. Souvent on en a remarqué qui, dès le premier jour qu’elles étoient sorties de leurs cellules, alloient à la provision du miel & de la cire.

Cette ardeur si précoce pour le travail est une preuve de leur amour pour le bien de leur société, & non pas, comme on pourroit le croire, la nécessité de pourvoir à leur propre subsistance, puisque les