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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/144

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joint à leur délicatesse, imprime aux humeurs le vice écrouelleux, en changeant la manière d’être du principe vital.

Plusieurs causes peuvent produire cette maladie : nous en admettrons deux espèces ; les unes internes, & les autres externes : dans les premières seront comprises une disposition héréditaire, le vice inné, ou qu’on apporte en naissant, & la contagion communiquée par une nourrice infectée du virus écrouelleux. Les causes externes ne sont point assez fortes pour produire cette maladie, si ceux sur lesquels elles agissent n’y ont une disposition. Les coups les plus violens, les blessures les plus fortes, en dénaturant, pour ainsi dire, les parties qu’elles intéressent, ne donneront point naissance à des ulcères d’une nature écrouelleuse ; elles ne communiqueront aux humeurs aucun vice, parce que leur action se borne au-dehors. L’usage des alimens grossiers, & de difficile digestion, celui de viandes salées, & des eaux bourbeuses, le défaut de propreté, sont autant de causes qui peuvent épaissir la lymphe, & établir une congestion gélatineuse, qui se déposera dans les vaisseaux de certaines glandes & dans les cellules du tissu cellulaire qui les avoisinent, & formera une ou plusieurs tumeurs écrouelleuses, qui se manifesteront à la peau en forme de chapelet.

Je dirai que le lait, dont on abuse dans certains pays froids & humides, sur-tout s’il est grossier, contribue beaucoup au développement de cette maladie. Dans le bas-Languedoc, on ne l’a pas encore observée comme étant l’effet d’une nourriture aqueuse & foible ; il faut convenir que les alimens y sont moins aqueux & plus abondans en sucs nourriciers, & que le bon vin qu’on y boit s’oppose aux progrès rapides qu’elle feroit, en donnant des forces aux organes digestifs, & à toute la constitution. L’air encore, par sa sécheresse, & sa salubrité brise les humeurs, & les rend moins propres à éprouver une dégénération muqueuse.

Le vice écrouelleux cause une infinité de désordres dans l’économie animale ; il produit les maux les plus dangereux, sur-tout s’il établit son siège dans des visières essentiels à la vie ; il est toujours moins dangereux, quand il attaque seulement les parties externes. Avec cette maladie, on peut vaquer à ses affaires domestiques ; mais il arrive aussi que lorsqu’il se dépose sur les articulations, il y forme des ankyloses qui empêchent de pouvoir marcher, & qui résistent aux remèdes les mieux appropriés, surtout, s’il date de loin ; son ancienneté le rend plus âcre, plus opiniâtre, & d’un caractère plus mauvais.

Ce ne sont point là les seules cruautés qu’il exerce ; je n’entrerai pas dans le détail des maladies dont il peut être le symptôme, cela mèneroit trop loin ; mais je ferai observer seulement que la pulmonie, les polypes au cœur, l’hémoptysie, l’asthme, la paralysie, l’atrophie mésentérique, le marasme, l’hydropisie, &c. que le vice écrouelleux entretiendra, sont incurables, & que l’art n’a pas encore assez de ressources pour les combattre avec quelques succès.

Les écrouelles qui viennent de cause externe, cèdent très-difficilement au traitement le plus méthodique : elles donnent néanmoins quelque espérance de guérison ; mais on ne