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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/170

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la préférence à un vin non égrappé, sur celui qui l’avoit été ; mais j’ose dire que cette comparaison dépend d’une multitude de circonstances : quant à moi, j’ose lui certifier que par-tout où l’on égrappe les vins, on préfère ceux qui l’ont été.

5. La grappe aide à la fermentation, &c. Oui, en apparence, & non en réalité. Je conviens que la vendange non égrappée paroît beaucoup plus fermenter que l’autre. En effet, le sifflement est plus fort, plus bruyant ; le marc s’élève beaucoup plus, mais ces deux signes extérieurs dépendent, l’un, de ce que la grappe laisse plus de facilité à l’air fixe pour s’échapper par les interstices qui restent entre les grappes ; l’autre provient de ce que la grappe, plus légère que le fluide, est 1°. soulevée par lui lorsque la chaleur de la fermentation le dilate ; 2°. par l’air qui se développe. Une cuvée, au contraire, bien égrappée, & dont les raisins ont été bien foulés, soulève petit-à-petit leurs pellicules, les colle les unes contre les autres, & forme ce qu’on appelle un chapeau très-pressé, très-serré, très-épais, & qui empêche en grande partie l’échappement de l’air, & par conséquent diminue son sifflement. À ces raisonnemens ajoutons l’expérience. Que l’on compare le produit de deux cuvées, toutes circonstances bien égales, l’une égrappée & l’autre ne l’étant pas, & on verra, lorsque la fermentation sera à son période, que le vin de cette dernière sera plus épais, & moins dépouillé de son mucilage, de son parenchyme, que celui de la cuve dont on aura égrappé le raisin. Il ne faut que des yeux pour juger du fait. La conséquence qui résulté de cette expérience, est que la fermentation a été plus complette dans l’un que dans l’autre.

L’exemple de la rafle seule qui fermente dans l’eau n’est pas concluant : elle éprouvera la fermentation vineuse, si elle est imprégnée du suc du raisin ; si elle ne l’est pas, elle éprouvera une fermentation putride & non vineuse, telle que la subiroient les sarmens ou tous autres végétaux. Dans ce sens la grappe n’aide donc pas la fermentation vineuse, & si elle fermente vineusement, elle le doit au suc dont elle est imprégnée.

6. La grappe empêche les vins de tourner à l’huile & à la graisse. Cette assertion exige des preuves. Peu de vins sont sujets à cette maladie, & je la regarde 1°. comme un vice de l’espèce de certains raisins, par exemple, toute la famille des pineaux est de ce genre ; 2°. de la nature du sol dans lequel le cep est planté ; 3°. de ce que le vin qui en provient n’a pas assez fermenté. Tout le monde sait qu’un vin qui graisse ou coule, à la manière des huiles, en filant, se remet de cette maladie, soit en roulant la barrique, soit en la transportant de la cave à l’air, & en l’y laissant quelques heures, soit en y ajoutant quelque acide & encore mieux un peu d’air fixe. Le vin graisse ou huile parce que son air fixe s’en est séparé, & un pareil vin dans nos provinces méridionales, seroit bientôt décomposé. Toutes ces opérations ont pour but d’y ramener l’air, & non pas d’opérer sur le vin, comme acide. Si on coupe ces vins tirés du pineau ou morillon, avec du vin d’une autre