Aller au contenu

Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/223

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le temps propre à sevrer les enfans, varie : la force du tempérament, leur âge, les circonstances où ils se trouvent, la nécessité de le faire, la délicatesse de leur constitution, établissent tout autant d’époques différentes.

Un enfant fort & vigoureux n’a pas besoin de teter aussi long-temps qu’un autre qui sera foible & très-délicat ; celui-ci exige de rester plus long-temps entre les bras d’une nourrice. S’il venoit à être sevré, s’il étoit réduit à l’usage des alimens d’une nature différente du lait, son estomac ne pouvant pas les digérer, il tomberoit dans un état de consomption qui le conduiroit au tombeau.

L’époque la plus ordinaire pour le sevrage, est depuis quatorze jusqu’à dix-huit mois ; il y a des enfans qui tetent trois & même quatre ans. J’en connois un qui en a teté quatre ; mais il étoit issu d’une mère phthisique, & dont les humeurs étoient si viciées, que la moindre piqûre qu’il se faisoit sur la peau, établissoit des plaies d’un mauvais caractère ; ce même enfant a été inoculé à l’âge de trois ans ; la petite vérole exerça sur son corps toutes ses cruautés. Depuis cette époque, il jouit de la meilleure santé ; mais il teta encore un an après avoir été inoculé.

Les enfans nouvellement sevrés exigent les plus grands soins ; on doit leur donner des alimens doux & de facile digestion, comme soupe à la viande & au lait. Dans la province de Languedoc, on est dans l’usaage de les accoutumer à manger tous les matins la soupe à l’ail : ce végétal est très-propre à fortifier leur constitution, & à les garantir des maladies. Personne n’ignore que l’ail est la thériaque des pauvres, & leur antidote.

Les fruits mûrs de toute espèce leur sont très-avantageux ; ils sont d’autant plus recommandables qu’ils peuvent leur faire oublier le lait de leurs mères. Les crèmes de riz, le vermicelle adouci avec le sucre, conviennent très-bien à leur tempérament. Si, malgré tous ces moyens, ils maigrissoient pour avoir été sevrés trop tôt, & qu’il y eût à craindre qu’ils tombassent dans la consomption, le plus sûr parti à prendre est de leur redonner le lait de leur nourrice, pour les remettre en bon état.

II. Ce sera toujours en vain que les enfans auront reçu de leurs parens une bonne constitution, si on ne prend les moyens nécessaires à sa conservation. Pour cela, il faut leur faire faire de l’exercice, par des moyens convenables à leur âge, sans nuire à leur accroissement.

Je crois que, pour parvenir à ces fins, on ne devroit pas se servir de lisières pour leur apprendre à marcher ; rien ne les expose plus à devenir voûtés. La poitrine des enfans étant le centre sur lequel porte leur corps, se trouvant fortement comprimée, la respiration devient difficile, le poumon s’altère, & les enfans restent exposés aux maladies de poitrine.

Voit-on les animaux se servir de ces moyens pour apprendre à marcher à leurs petits ? La nature ne les instruit-elle pas ? Pourquoi les enfans seroient-ils privés des mêmes avantages ? Ceci n’est pas un paradoxe ! Ne trouve-t-on point d’exemple d’enfans qui aient appris à marcher d’eux-mêmes ; J’en connois deux qui n’ont jamais été emmaillotés, & qui à l’âge de huit mois, se rouloient sur un tapis, & s’aidoient de leurs pieds