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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/560

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un corps enflammé d’un corps inflammable, ce dernier parviendra bientôt à l’état du premier, & tous deux brûleront, parce que le corps enflammé se communiquant à celui qui l’avoisine, s’y distribue uniformément, agit insensiblement sur toutes ses parties, les divise, les sépare, les fond, les calcine, ou les volatilise, suivant leur nature. Voici comment on peut concevoir cette action du feu. La matière ignée, en se répandant entre les pores d’un corps, ou en s’y développant tend à écarter leurs parties, & à les séparer les unes des autres, comme l’eau tend à écarter les parties d’une éponge qu’elle pénètre. Ainsi, dès que le feu se met en possession d’un mixte quelconque, ses parties se dilatent aussi-tôt, & occupent une plus grande place. Ce premier effet, la dilatation, a lieu dans tous les corps, plus sensiblement cependant dans les fluides que dans les solides ; c’est une vérité constante, & dont nous nous appercevons tous les jours. Cette dilatation est un premier degré de séparation, & facilite de plus en plus l’action du feu : si les parties du corps se divisent en molécules si tenues qu’elles pèsent moins que l’air qui les environne, alors elles s’élèveront avec le feu & se volatiliseront ; si elles sont plus pesantes & fixes, alors elles se contenteront de se détacher les unes des autres, & prendront une forme pulvérulente, telles sont les cendres, dernier résidu ordinaire de presque toutes les substances qui ont été enflammées. Non-seulement les fluides se volatilisent à un certain degré de feu, mais ils entraînent encore avec eux les parties les plus légères des corps qui y sont plongés, & cela par gradation. Comme toutes les parties qui entrent dans la composition des solides n’ont point entr’elles la même cohérence, les moins fixes se séparent les premières, à un degré de feu qui ne suffit pas pour détacher les autres & les volatiliser ; on y parvient cependant en graduant la chaleur, c’est-à-dire, en augmentant le feu depuis le degré le plus doux, qui suffit pour séparer les parties les plus volatiles, jusqu’au degré le plus fort, qui est nécessaire pour élever celles qui sont les plus tenaces & les plus fixes : c’est un moyen que la chimie & les arts emploient pour analyser les mixtes, & séparer leur principes ; cette opération est connue sous le nom de distillation. (Voyez Alambic, Distillation)


§. III. Manière de produire & d’entretenir le Feu.


Tous les corps qui se rencontrent dans la nature, semblent recéler dans leurs veines la matière ignée, qui n’attend que l’instant, une circonstance favorable pour se développer : Boerhaave est parvenu à tirer des étincelles de la glace même. Mais quelles sont les causes les plus propres à forcer la matière du feu de se développer & de se manifestez dehors ? Un ébranlement violent dans les parties insensibles des mixtes peut produire cette effet, & cet ébranlement peut naître ou d’un frottement rapide, ou de chocs redoublés, ou de l’effort que quantité de substances sont pour se pénétrer les unes & les autres.

Toutes les fois que deux corps frottent rapidement l’un sur l’autre, il en résulte un ébranlement qui se transmet aux parties insensibles de