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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/148

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CHAPITRE II.

Comment faut-il labourer ?


Jusqu’à présent, tout a été, pour ainsi dire, spéculation pour le cultivateur & objet de méditation : il s’agit actuellement de la pratique, & cette pratique suppose l’examen de trois questions ; 1°. quelle doit être la profondeur du labour relativement à un champ ? 2°. Dans quelle circonstance doit-on labourer ? 3°. Comment faut-il labourer ?


Section Première.

Quelle doit être la profondeur du labour relativement à la qualité de la terre ?


Le cultivateur, avant de labourer, doit avoir étudié & connoître, 1°. quelle est la profondeur de la couche supérieure du champ, & sa qualité ? 2°. Dans la supposition qu’elle soit mince, de quelle nature est celle de dessous ? 3 °. Quel est le parallélisme ou inclinaison de son champ ? enfin les avantages qu’il peut retirer, ou ce qu’il doit craindre de l’inclinaison ?

I. De la profondeur de la couche supérieure, & de sa qualité. Toute plaine en général est primordialement l’ancien lit des eaux lorsqu’elles couvrirent la surface de la terre ; par conséquent elle est toujours formée par un dépôt : ce dépôt est fertile, ou de médiocre qualité, ou mauvais, suivant les matériaux dont il est composé. On doit les appeller dépôts de première formation. Pour avoir une idée générale de la manière dont ils se sont établis, il suffit de jeter un coup-d’œil sur la carte géographique des bassins de France, & sur leurs descriptions, insérées au mot Agriculture. Tel est, par exemple, le banc de craie qui traverse toute la France de l’est au nord-ouest, & qui se prolonge jusqu’à l’extrémité de l’Angleterre ; tels sont les faluns de Tourraine, &c. &c. Ces premiers dépôts dans la plaine ont été ensuite améliorés ou détériorés par des causes accidentelles ; tels sont les dépôts des rivières, des fleuves, qui dans leurs débordemens exhaussent les plaines avec les terres ou sables, ou pierres qu’ils charrient : enfin, par leur changement de lits successifs, attirés tantôt par une montagne, tantôt par une autre. De ces différentes circonstances présentées ici très en abrégé, dépend la qualité de la couche & sa profondeur. On peut encore ajouter que, pour l’ordinaire, la couche de terre de la plaine est toujours de même nature que celle des pierres des montagnes voisines, & que le grain de terre n’est que le débris de ces pierres. Ainsi, en supposant les montagnes circonvoisines calcaires, les terres de la plaine seront bonnes. Si les montagnes sont de granit, ou d’autres substances vitrescibles, le sol sera maigre, pauvre & très sablonneux, &c. On doit encore considérer si le courant des fleuves & des rivières est rapide ou lent ; dans le premier cas, la bonne terre entraînée & dissoute par l’eau, est portée au loin, & le sable vif fait la moitié du dépôt ou sa totalité. Si le cours est lent, la terre dissoutes a le temps de se déposer, & le sol devient fertile. Il résulte de ces circonstances soit éloignées, soit nouvelles, que les couches de terre sont en raison des causes qui les ont for-