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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/294

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Ce lin n’exige pas d’autre culture dans cette année & pendant les suivantes : il faut sur-tout prendre garde que la terre où on l’a semé soit bien meuble, sans aucune motte ou gazon que l’on brisera s’il s’en trouve. Si la terre est absolument sèche & maigre, on pourra y mettre du fumier, mais en petite quantité.

Pour mieux faire concevoir l’avantage que procure cette plante, il suffit d’en faire le parallèle avec le lin ordinaire. Celui-ci se seme pendant deux mois, avril & mai. La première semence est sujette à être gâtée pendant le mois de mai : il ne reste qu’onze jours en terre avant de lever ; celui de Sibérie peut être semé dès la fin de mars ; il ne lève qu’au commencement de la huitième semaine[1], & on n’a pas à redouter pour lui les gelées printanières. On n’a pas besoin, pour en avoir, d’en semer du nouveau, comme le lin annuel, qui peut être totalement gelé.

Le lin annuel demande une bonne terre grasse & bien fumée. Le lin vivace, au contraire, vient dans une terre sablonneuse & presque sans fumier, & il faut moins de semences. La racine du lin annuel est simple & ne porte qu’une seule tige ; celle du lin vivace, au contraire, produit toutes les années de nouveaux jets. Il est plus facile de sarcler le lin de Sibérie que l’autre, sans craindre de l’arracher.

Les tiges des feuilles du lin vivace sont d’un verd foncé ; celles du lin commun, venu dans un terrein sabloneux, sont d’un verd-clair, & dans un terrein gras, d’un verd plus foncé ; mais moins cependant que celui de Sibérie. Quand la plante de lin commun est vigoureuse, & lorsqu’elle a les feuilles bien larges, on a tout lieu de s’attendre à une bonne récolte ; c’est le même indice dans le lin de Sibérie ; il passe d’un tiers en hauteur le plus beau lin commun. Ils mûrissent tous deux dans la onzième ou douzième semaine, à compter de la germination. La filasse de l’un & de l’autre a une égale blancheur.

Quand le lin de Sibérie est coupé, & qu’il a été un peu de temps sur le terrein, pour le faire sécher, on le ramasse par petites poignées ; on sépare la graine de la tige avec un peigne de fer nommé communément gruge. Lorsque cette opération est faite, on ramasse la graine sur de gros draps pour la faire sécher ; ensuite on la bat, on la vanne, & on la met dans le lieu qu’on lui destine, ayant cependant soin de la remuer souvent, de peur qu’elle ne moisisse & qu’elle ne s’échauffe ; ce qui pourroit arriver si elle n’étoit pas bien sèche. Quant à la tige, on la fait de nouveau sécher au soleil ; & lorsqu’elle est bien sèche, on la met en botte : on prend sur-tout garde de mettre toutes les parties supérieures des tiges du même côté. On transporte ainsi ces tiges dans les endroits où on veut les faire rouir. (Voyez ce mot & ce qui a été dit à l’article Chanvre) Comme elles sont extrêmement sèches, elles rouissent facilement. On les met dans l’eau pendant quelques jours, & on choisit la plus claire ; celle de fontaine est préférée. Lorsque les tiges

  1. Note de l’Éditeur. Ceci paroît contradictoire avec ce qui est dit plus haut sur le temps de sa germination.